Ma thèse était enfin terminée, et surtout, enfin rendue ! Je revivais depuis ce moment-là. Je n’avais déjà presque plus de cours à donner, ni de travaux universitaires à rendre… Ma vie reprenait enfin son cours. J’avais décidé de faire le tour de la région d’Ahovu, en touriste cette fois, et non en cavale pour obtenir des témoignages scientifiques.

J’étais en train de flâner à Agapé, habillé d’une simple veste pastel et d’un bermuda léger au teintes claires, regardant les Pokémons aquatiques flâner dans l’eau à travers mes lunettes de soleil colorées. Je n’avais rien de prévu, si ce n’était faire les boutiques, alors je prenais mon temps. J’en profitais d’ailleurs pour laisser Mochi et Prince en dehors de leur Pokéball afin qu’il profite des températures qui remontaient progressivement. Le jeune Evoli passait son temps à jouer avec la queue de Prince, quand il ne jouait pas avec sa propre queue comme un débilos…

Après ces instants de flânerie, je me dirigeais vers les Galeries Lafouinette. Les vêtements y étaient particulièrement onéreux, mais si jolis… Je ne pouvais pas manquer la collection de printemps de cette année. J’étais une fashion victim à mes heures perdues, ce qui me désespérait un peu, par moment.

En arrivant devant les portes automatiques, j’aperçus que la boutique était fermée et que la police était présente. Police Agapéenne et Police Bedwyroise. Quelque chose d’étrange avait dû se passer. Je restai dans un premier temps très discret, avant d’apercevoir un visage familier.

Layla…? Je ne savais pas qu’elle était devenue policière. On ne s’était pas parlé depuis les premières années de l’Académie. J’avais envie de lui faire signe, mais elle avait l’air d’être en fonction.

Après avoir écouté de quoi il s’agissait, je finis par comprendre qu’un groupe de Léopardus avait encore décidé de semer la zizanie dans les boutiques. Ces créatures étaient difficiles, en matière de mode, ou bien ? La police appelait les dresseurs expérimentés à venir aider sur place afin de calmer les Pokémons sauvages et de sauver la fameuse collection. Sans réfléchir, je m’avançais. Mon visage était connu, et en tant que champion d’arène, je suppose que je n’allais pas être de trop ?

J’en profitais pour saluer Layla d’un signe de main, espérant qu’elle me propose de rejoindre son groupe pour la suite des opérations.

Layla avait fini par m’apercevoir, ce qui m’encouragea à m’avancer vers elles, suivi de mes deux Pokémons. J’avais peut-être été un peu perturbé par la mention de “cet homme”, mais elle ne pouvait pas vraiment savoir, puisque je ne lui en avais jamais parlé. Enfin, je n’étais pas non plus une femme, et me désigner comme un homme n’était pas si dérangeant que cela, alors je ne relevai pas. Peut-être que je pourrais lui en toucher deux mots plus tard ? En tout cas, ça n’était des plus urgents, pour l’heure. Ma non-binarité passe largement en second, pour l’heure.

Nous reçûmes les indications et la marche à suivre, dans le but de faire fuir les Pokémons sans les blesser. Et il fallait également sauver le plus de vêtements possibles des griffes des Léopardus déchaînés. Je ne savais pas si mes deux jeunes Pokémons effraieraient le moindre félin, mais un bon entraînement les rendra plus forts. Et s’ils ont du mal au début, je n’aurai qu’à demander à Naito ou à Kleis de les aider.

Brisant le silence la première, Layla me sortit de mes pensées, alors que je faisais signe à Mochi de se dépêcher de venir à mes côtés, plutôt que de renifler le Caninos bleu. Avec leurs couleurs inhabituelles, ils faisaient bien la paire, ces deux-là.

“O-ouais. On ne devrait pas avoir trop de mal à les repousser. Ce qui m’inquiète, par contre, c’est la collection de printemps. Faut vite agir avant qu’il n’y ait plus rien que des lambeaux méconnaissables.”

Nous finîmes par rentrer dans les galeries, prenant garde à ne pas nous faire attaquer par les Léopardus fashion victimes qui pourraient nous sauter dessus à tout moment. Je sentis un mouvement en ma direction et levai directement la voix vers Mochi pour qu’il arrête le Pokémon…

…Et c’était juste un Fouinette, qu’il avait interrompu. Lui ayant sauté dessus, l’Evoli était actuellement en train de lui mordiller les oreilles et de la mâchouiller.

“Tu peux le lâcher, ce n’est pas notre cible…”, soupirais-je remarquant enfin un Leopardus prêt à bondir à pleines griffes sur un mannequin innocent. “Prince, Vent Féérique !”

Une capacité peu forte, mais avec l’affinité des Types, ça devrait au moins calmer le gros chat féru de mode. J’avais également très hâte d’observer Layla à l’action, d’autant plus que son Caninos était magnifique…

Tous les agents mobilisés s’en sortaient, à première vue. Enfin, je crois et j’espère, surtout. De notre côté, nous n’éprouvions vraiment pas de difficulté, avec Layla. Elle devait être sacrément forte et entraînée. Ils avaient des entraînements spéciaux, dans la police, non ? Il me semblait qu’elle était spécialisée en dressage canin, ou quelque chose du genre. Je pourrais toujours lui demander quelques précisions à ce sujet plus tard, comme je n’en étais plus trop certain.

Essayant tout de même de rester concentré sur notre tâche, j’envoyais successivement Mochi et Prince attaquer un Léopardus plus gros qu’un autre, sans doute un des chefs de la meute assaillante. Il fallait être prudent, d’autant plus que l’Evoli rosé était assez jeune et inexpérimenté.

“Prince, Écrasement sur le Léopardus !”, lui lançais-je en espérant que ça l'effraie… Et en effet, il semblait tétanisé. Il ne s’y attendait pas, il faut dire ! J’en profitais pour donner des ordres à Mochi, cette fois : “Vive-Attaque et Coup d’Main pour aider Prince !”

Il s’était étonnamment et docilement exécuté, lui, qui était pourtant assez imprévisible. C’était rassurant, qu’il ne fasse pas n’importe quoi quand j’avais besoin de lui. Je devais le discipliner pour qu’il grandisse dans de bonnes conditions. Et aussi pour ne pas avoir de problème avec l’Organisation, soit dit en passant… Déjà que je possédais beaucoup de Pokémons. J’attirais forcément l’attention.

Le Léopardus avait percuté de plein fois Mochi d’une Griffe acérée, ce qui me serra le cœur. Heureusement, il tenait bon, et Prince lui avait porté secours en chargeant et donnant des coups de sabots au félin qui finit par s’enfuir.

“Mochi, reviens ! Naito va te remplacer.” Autant le préserver, et envoyer un de mes plus puissants combattants. Cette fois, j’allais peut-être en faire trop, mais j’allais en effrayer plusieurs grâce à mon Gardevoir. “Feu Ensorcelé ! Ne brûle rien, utilise juste ça pour les effrayer, ça suffira.”

De toute façon, il était extrêmement docile, j’avais confiance en lui pour ne pas détruire ce magasin de luxe vestimentaire.

Son Minisange se débrouillait sacrément bien, j’étais impressionné qu’un si petit oiseau en fasse voir de toutes les couleurs à ces félins à ce point. C’étaient eux, les prédateurs, après tout. D’ailleurs, le Léopardus le plus dominant du groupe n’en avait pas eu qu’après Mochi. Le Minisange s’était pris de sacrés dégâts également, ce qui m’inquiétait. C’était si fragile, une vie d’oisillon… Tout comme celle d’un petit Evoli de quelques mois. C’était pour cette raison que j’avais sorti le grand jeu en appelant Naito.

Le Gardevoir approchait ses flammes des matous pour les faire fuir, ou brûler légèrement leurs longues moustaches, afin de leur donner la frousse de leur vie.

D’ailleurs j’y pensais, mais c’était peut-être un peu louche, que je le sorte comme ça, alors que je n’étais même pas à l’arène. Surtout devant Layla. Elle allait se poser quelques questions. Normalement… à Bedwyr, en tout cas, on ne possède pas vraiment de Pokémons. Ou alors, des inoffensifs, ou bien ceux qui sont élevés pour effectuer des tâches bien précises dans notre travail. Aucun de mes Pokémons n’avaient été élevé dans le but d’être des outils. En même temps, à Tôkan, on était très opposés aux idéologies Bedwyroises… Dans mon cas, je tâchais de rester neutre. Bedwyr me permettait d’avoir un travail stable et bien rémunéré, et surtout, de voir autre chose que les neiges de Sunoh.

Je trouverai bien des excuses plus tard. En attendant, mon Pokémon était particulièrement efficace. Je finis par mener la suite des opérations, commençant enfin à voir le bout de tout ce capharnaüm : “Éclat Magique et Vent Féérique, vous deux ! Il en reste un petit groupe dans le rayon chaussures !”

Des chaussures aux motifs de Léopardus… Quel mauvais goût, sérieusement ! C’était vraiment pas portable, ça… Mais je n’avais pas à juger les goûts douteux des stylistes à l’oral, gardons ça dans ma tête… Ou alors je partagerai mon ressenti à Layla autour d’un verre quand on sera sorti de notre mission.

“Layla, tu t’en sors de ton côté ? J'ai l'impression qu’il n’y en a bientôt plus dans cette zone ! Allons voir si les autres en ont terminé eux aussi !”, lui proposais-je, transpirant un peu.

J'étais assez anxieux à l'idée qu'elle me considère comme suspect ou dangereux, aux côtés de mes Pokémons. Qu'elle me voit comme une menace pour l'Organisation. Pourtant, je devais arrêter de me prendre la tête. C'était normal d'en avoir, quand on était champion, non ? Un champion avec très peu de Pokémons, ça n'était pas commun… Enfin, bref. Comme elle ne disait rien, elle ne devait probablement pas se poser plus de questions que ça. Aussi dangereux qu'il puisse en avoir l'air, mon Gardevoir était obéissant et surtout, inoffensif. Tant que je ne lui donnais pas d'ordres, en tout cas.

"On en a enfin terminé pour ici ! Je me demande s'ils s'en sortent ailleurs."

Le chef du groupe de policiers nous annonça les prochaines opérations. Il restait une zone où… ils ne s'en sortaient pas vraiment. Ça ne devait pas être si compliqué que ça de mes faire fuir, s'il n'en restait plus beaucoup. Autant régler ça rapidement ! Ensuite, nous pourrons… peut-être essayer de créer des liens ? Cela faisait si longtemps… on ne se connaissait plus, on avait pris des chemins si différents.

"Allons-y, alors ! Et euh… désolé, c'est un peu gênant… mais ça te dirait de boire un verre après ça ? On ne s'est pas vus depuis si longtemps…"

Si j'avais été hétéro, ça se serait apparenté à de la drague. Une tentative ratée en tout cas. Heureusement… je n'avais vraiment aucune pensée derrière cette proposition.

Maintenant, nous étions parés à faire peur aux félins de cette zone. L'un d'eux était… très gros aussi. En plus d'être chromatique et d'arborer de jolies couleurs flashy. Enfin, jolies… ce n'était pas à mon goût, pour être honnête.

"Naito, recommence à l'effrayer avec tes flammes ! Attention à ne rien brûler surtout."

Comprenant bien mes ordres, le Gardevoir recommença cette manœuvre pyrotechnique.  Or, cela avait du mal à impressionner le Léopardus qui avait compris que c'était du bluff.

"...Bon. Utilise une attaque Fée, ça sera plus efficace, en fait.", soupirais-je alors que des Éclats Magiques volaient en direction du félin qui grondait avec colère avant de s'éloigner avec quelques autres de ses semblables.

J’espérais sincèrement qu’elle n’ait pas pris cette invitation à boire un verre comme une tentative minable de drague. Parce que je n’étais pas vraiment intéressé par les femmes. Je ne dis pas que c’est impossible que mon cœur batte pour une femme, un jour, mais pour l’heure, ça n’était jamais arrivé. Elle avait tout de même accepté, ce qui me rassura aussitôt. Elle ne se faisait pas d’idées, pas vrai ? Penser ça m’aidait à me détendre un peu. L’anxiété sociale et la timidité, c’était parfois pas facile pour les nerfs. On s’en faisait trop pour un rien.

Je restais tout comme elle assez silencieux alors que j’ordonnais à mon Gardevoir de changer de stratégie. Je tiquais peut-être un peu lorsqu’elle dit qu’il était “plus que pratique”. Ou alors elle parlait de moi ? Dans le premier cas, cela faisait… Un peu “pratique” comme le serait un objet, non ? Je me faisais sans doute trop d’idées… Si elle parlait de moi, la formulation était peut-être un peu maladroite, mais ça ne me dérangeait pas plus que ça.

Nous avions enfin terminé notre mission. J’avais hâte de me rafraîchir et de me détendre. Mais il semblerait que ça soit pour une prochaine fois. Layla avait été appelée pour conclure cette opération en bonne et due forme. J’étais un petit peu déçu, mais ça ne faisait rien !

“J’habite toujours à Uthyrgham ! Tu sais, je suis prof de biologie, maintenant. J’ai du…oublier de le préciser. On aura d’autres occasions de se croiser, je me fais pas de souci.”, lui souriais-je doucement, avant de nous séparer. Je n’allais pas plus la déranger dans son travail.

Je décidai d’aller tout de même boire un verre de mon côté, en bordure du Lac Atta, en ne pensant qu’à mes vacances récemment débutées.