Cela avait pris un petit moment avant que je me décide à retourner dans la Sylve Brumeuse et ses environs. J’avais retenu la leçon la dernière fois. Un bras disloqué par un Galopa de Galar vénère. Oui…une leçon violente et douloureuse. Bref. J’avais décidé de me rendre au Roseraie des Fées, un endroit majestueux, une clairière composée d’une multitude de roses de toutes les formes et de toutes les couleurs. C’était réellement magique.

J’avais fait attention à ne pas mettre les pieds hors du sentier menant à la clairière, ne voulant pas me retrouver dans le brouillard. La brume, cette abomination qui faisait perdre tous ses repères et qui vous menait là où il n’était pas recommandé d’aller. Nope. Je ne voulais pas revivre l’aventure! Surtout que cela m’avait coûté une ou deux thérapies et une visite à l’hôpital du district. Je préférais la clairvoyance et la prévention pour cette fois-ci. Mes bras avaient assez souffert. Ils méritaient du repos bien mérité!

J’étais en train d’admirer la beauté de la nature et Tytus qui s’amusait avec quelques pokémons sauvages du coin lorsque je sentis une présence derrière moi. Les poils sur ma nuque se hérissèrent alors que mon corps tout entier se figeai, se crispait. Je me croyais seul, complètement seul et voilà que ce n’était plus du tout le cas. Je sentais son regard sur moi, pesant, profond et mon anxiété grimpa d’un coup sans crier gare. Qui était-ce ?! Non. Je…pas lui ?! Non…j’espérais qu’il ne m’avait pas retrouvé, qu’il m’avait oublié!

Lorsque j’entendis la voix de l’inconnu derrière moi m’interpeller par mon prénom, je tressaillis de manière assez perceptible. Mon cœur se mit à battre à tout rompre dans ma poitrine. Je reconnaissais cette voix. Meteor Quartz. Lieutenant dans l’organisation Trismegis et supérieur de mon ex. Je sentais mon corps devenir lourd et je tremblais. Il était là pour me ramener chez lui ! Oui, j’en étais plus que certain!

Les mots que l’Agapéen prononça ensuite ne furent que du bourdonnement à mes oreilles. Je me plaquai les mains sur ces dernières, ne voulant plus l’entendre. J’étais en panique, je ne me contrôlais plus. Déjà, Bedwyr, l’interrogatoire forcé au quartier militaire et cette angoisse qui ne faisait que grossir depuis. Je me savais fautif de bien des choses, mais pourquoi ne pouvait-on pas me laisser tranquille !?

- NON!

J’avais crié sans m’en rendre compte. Je secouai la tête en reculant pour éviter que Meteor ne s’approche trop de moi. Je n’arrivais pas à rester calme. Pourquoi? Pourquoi ?! J’aurais dû faire profil bas! J’aurais dû partir encore plus loin! Pourquoi est-ce que Trismegis revenait toujours vers moi et qu’elle ne pouvait pas me foutre la paix !?

Je posai mon regard améthyste à la fois sombre d’angoisse et d’effroi sur le visage de Meteor. Tytus plus loin s’était interrompu en m’entendant crier et se rapprochait de moi. Il prévint une chute lorsque je trébuchai, me retenant de ses lianes.

- Pourquoi est-ce que je ne peux pas être libre !? Tu es là à cause de lui c’est ça !? Non, je ne reviendrai pas! JAMAIS!

Je retenais de peine et de misère mes larmes de détresse et de colère. J’avais explosé. Oui. Moi. J’avais tout gâché! Meteor allait me ramener de force à Trismegis et on allait m’enfermer, encore! On allait m’empêcher d’être heureux et je serais de nouveau la source de tous les malheurs! Je secouai la tête alors que mon Bulbizarre tentait de me faire recouvrer mes esprits. J’avais complètement péter un câble et maintenant, j’avais l’air complètement taré.

WARNING : ABUS & CONTENUS SENSIBLES

Je me trouvais dans une impasse. C’était tout ce qui me venait en tête dans l’immédiat. Une impasse. Je ne décernais plus le vrai du faux, l’imaginaire de la réalité. Mon cerveau était malade et il dérapait. Je retenais du mieux que je le pouvais mes larmes alors que l’homme blond tout près de moi essayait de comprendre la situation. J’avais l’impression de manquer d’air, mais je sentais mes poumons en feu. Je respirais. Ce n’était qu’une illusion de mon propre mental affecté et délirant. Je finis par fermer les yeux alors que Tytus me retenait avec ses lianes. S’il n’avait pas été là, je me serais effondré sur le sol comme une masse. Je serrais les dents et les poings. Mes ongles me déchiraient presque la peau. C’était le moindre de mes soucis. Peu importe.

Je finis par capter des mots, petit à petit. Malgré ma paranoïa, ma crise de colère, si je pouvais l’appeler ainsi, je percevais sa voix et je percutais ses paroles. Chaque mot devenait une phrase avec du sens. Fleur…Fleurestine. Pourquoi ramenait-il cette personne sur le sujet? Pourquoi un autre lieutenant de cette organisation sadique et cruelle devenait-il important? Lui, Meteor, il disait ne pas vouloir me ramener, mais qu’en était-il de Fleur? Non. Je ne pouvais pas avoir confiance. C’était une ruse, un subterfuge!

Je me braquai davantage et mon Bulbizarre resserra ses liens sur ma personne, sur mon corps. Et voilà qu’il ramenait mon ex dans le décor. Non…pas lui! Je frémis de tout mon être. Un frisson violent et aussi froid que le souffle glacé d’un Oniglali. Je finis par rouvrir mes paupières pour regarder Meteor en face de moi. Il avait tendu une main. Je la regardais avec intensité, méfiant tout de même. Mon cœur battait vite dans ma poitrine. Je me sentais le souffle court, mais c’était simplement parce que je respirais fort et vite.

Je ne bougeai pas. Je ne savais pas quoi faire en réalité. Devais-je le croire sur parole, lui, un lieutenant Trismegis? Non. Bien sûr que non. Pourtant…je voyais de la sincérité dans son regard et il restait calme face à moi. Un militaire. Il avait l’attitude d’un soldat entrainé à toute éventualité. Je retins mon souffle un instant. Je n’arrivais pas à réfléchir. Je tournai le regard vers Tytus. S’il ne l’avait pas attaqué c’était donc que les intentions de l’homme blond étaient bonnes, non?

-…

Je n’arrivais pas à parler. Je reportai mon attention sur le lieutenant Quartz, sur sa main. Cette main me dérangeait. Je ne voulais pas y toucher. Une main tendue m’avait trop souvent trompée pour être fiable. J’avais été trop docile et naïf. Pourtant, mon pokémon type plante et poison me rapprocha doucement de cette main pour que je la prenne. Je n’en avais pas du tout envie et je me mordis fortement la lèvre inférieure en guise de nervosité.

Mes doigts se glissèrent dans la paume offerte et grande ouverte de l’homme face à moi et mes améthystes tombèrent dans son océan de glace blanche. Je déglutis et resserrai ma prise légèrement avant qu’il me m’aide à me relever et que Tytus me libère de ses lianes. Je me sentais faible et vulnérable tout autant de corps que d’esprit. Pouvais-je me laisser aller avec cet homme que je connaissais peu et qui me disait ne pas être là pour moi? Ma nervosité montait en flèche dans mes veines tout comme l’adrénaline. Mon envie de fuite se faisait insistante. Pourtant, je ne pris pas mes jambes à mon cou et je laissai Meteor me guider jusqu’aux pierres.

Une fois là-bas, je tentai de me calmer un peu même cela était assez difficile pour le coup. Mon regard était redevenu fuyant et je gardais une bonne distance entre l’autre et moi. Je préférais cela. Je me mis à jouer avec me tissu de mon haut, mes doigts le triturant ici et là. Il voulait tout savoir, mais je ne savais pas si j’avais envie de tout confesser. Nous n’étions pas amis. Nous n’étions rien. Il n’allait pas comprendre et simplement me dire que je surréagissais. Mon ex avait toujours su avoir le bon rôle. Il avait toujours su faire bonne figure et cacher les preuves.

J’inspirai longuement avant d’arrêter de jouer avec mon haut. Je baissai les yeux vers le sol devant mon. Je me mis à murmurer d’une voix tremblante à peine audible.

- J'aurai ma revanche, dans cette vie ou dans l'autre.

Oui. Il allait payer pour ce qu’il m’avait fait. Peu importe que l’acte soit immoral ou non. Un jour, j’allais le tuer et bien le faire souffrir.

Je me permis un regard vers Meteor alors qu’il me parlait de taper sur des trucs. Ce n’était pas trop mon genre. Le meurtre n’était pas permis, mais j’allais quand même me le permettre. Peu importe la suite quand cela serait fait. Je n’en avais rien à faire du après. Je secouai simplement la tête en tentant de faire diminuer les battements rapides de mon cœur. Je me pris la tête entre les mains et fermai les yeux. Je voulais redevenir calme.

- Il…Il a contrôlé ma vie pendant tellement longtemps…Je ne veux plus qu’on m’enferme…qu’on me séquestre et recevoir de pardon à chaque fois qu’on me blesse comme si ce n’était rien…Il…C’est un monstre…tu comprends? Tu comprends !?

Je geins en me refermant comme une huitre. Je n’aimais pas en parler. Mais mon psy me disait qu’il fallait que je m’ouvre aux autres. Je ne devais plus être une victime. C’était trop difficile de changer depuis tout ce temps. Je sentais toujours ce besoin de me faire petit, de me rabaisser pour plaire et dire oui à tout. J’avais de nouveau envie de pleurer. Merde!

- Je suis brisé…et je ne sais plus comment me réparer…Il manque des pièces…ici et là.

Je pointai mon cœur et ma tête avant d’avoir un rire jaune un brin lugubre et désespéré. Ce qui me manquait, même mon psy ne pouvait me le rendre. Allez mieux ne voulait pas dire être comme neuf. Jamais je ne pourrais redevenir l’autre moi. Celui de ma jeunesse. Je ne pourrais jamais être celui du futur non plus.

Je me remis à jouer avec le tissu de mon habit, regardant le vide devant moi de mes améthystes éteintes et larmoyantes.

Je me sentais largué, complètement largué à vrai dire. Je ne savais pas trop pourquoi je parlais. Je ne me rendais même pas compte que des larmes avaient commencé à couler sur mes joues alors que ma seule obsession sur le moment c’était de jouer avec la bordure de mon haut. J’entendais les mots de Meteor, mais je ne leur donnais aucun crédit, aucune réelle attention. À quoi bon? Je me retrouvais là, assis sur des pierres à ne plus savoir quoi dire ou quoi faire. Je me sentais las et misérable. Je me recroquevillai davantage sur moi-même. Un ricanement amer traversa la commissure de mes lèvres alors que le lieutenant Trismegis parlait de preuves. Quelles preuves? Non. Il n’y en avait pas. Il n’y en avait jamais eu.

-…

Je restais dans mon mutisme momentané encore de longues, très longues minutes. Je regardais le vide devant moi sans rien voir, rien apercevoir. Tytus lança un léger cri inquiet alors qu’il jetait un coup d’œil à l’autre humain. Je fermai les paupières lentement et les rouvris avec la même lenteur. Des larmes tombèrent sur mon habit, mais je n’y fis pas attention. J’étais fissuré, brisé, anéanti. Depuis des années ces blessures mentales et psychologiques n’avaient fait que se creuser plus profondément dans mon être. Je me retrouvais sans repère et déboussolé, paranoïaque et dans un immense mal-être.

Mon cœur palpitait encore dans ma poitrine, mais je faisais comme si je ne l’entendais pas pulser jusque dans mes tempes. Un bruissement un peu plus loin me fit tourner légèrement la tête. Un pokémon, juste cela. Mon envie de fuite avait disparu et avait laissé place à l’abandon. J’étais là comme une proie qui avait décidé d’arrêter de se battre et que si elle devait mourir ici et maintenant, elle n’en avait plus rien à faire. J’étais un peu pareil.

Je n’avais rien demandé à Meteor et pourtant, il voulait m’aider. Moi. Une personne qu’il connaissait à peine et qu’il n’avait pas revu depuis l’incident de la drague à Bedwyr. Un souvenir remonta à ma mémoire vis-à-vis cet événement et je me rembrunis encore plus. Mon ex m’avait que trop bien fait comprendre que mon corps et tout le reste lui appartenait. Hors de question de fréquenter d’autres gens et si l’on me draguait et bien, j’étais une putain, un chercheur d’attention. Je déglutis et finis par relever mon regard las et terne vers le lieutenant Quartz.

Mes améthystes semblaient briller grâce aux larmes qu’elles retenaient par moment. J’entrouvris les lèvres pour dire quelque chose, mais rien n’en sorti sur le coup. Je répétai l’action quelques fois de plus avant de parvenir à un faible murmure.

- Il n’y a rien…

Oui. Mon ex avait toujours su faire attention. Me manipuler à sa guise et faire de moi sa poupée, sa possession en mode soit belle et tais-toi. J’avais été fidèle, obéissant et cela ne m’avait jamais rien rapporté en somme. Il avait tout contrôlé de ma vie pendant ces treize années et moi, je n’avais jamais tenté de me rebeller. Je l’aimais. Quoi de plus stupide comme raison de pardonner n’est-ce pas?

- J’ai merdé en le quittant n’est-ce pas?

J’étais libre, mais complètement foutu quand même. Ma tête n’allait pas bien, mon corps, je n’en prenais pas aussi bien que je devais et mes décisions…elles craignaient un max le trois quart du temps. Une pensée sombre me fit frissonner. Aurais-je dû…continuer? Peut-être…peut-être que cet amour factice valait mieux que ce que j’avais à présent? Je doutais. Je me sentais largué. Je…je me mis à pleurer à chaudes larmes. Oui. J’avais besoin de pleurer pour évacuer le stress et mes pensées malsaines et incohérentes. Qui pouvait préférer la séquestration et le contrôle à la liberté et le libre arbitre?

- Je vais m’en sortir?

Tant de questions qui pouvaient paraitre enfantines, mais qui pour moi étaient nécessaires. Avoir quitté mon ex avait été la plus importante décision de ma vie après bon nombre d’années. Maintenant, je devais tout recommencer du début et survivre au carnage mental de mon propre être. Les dégâts me semblaient irréversibles. Pourtant, Meteor croyait le contraire. On pouvait croire à un renouveau. Je pouvais croire à quelque chose de mieux pour moi.

Je retirai le seul contact physique qui restait entre moi et le lieutenant Quartz. Je me détournai un peu de lui pour regarder un peu plus loin les fleurs et les pokémons environnants. Tytus restait tout près veillant sur moi comme le ferait un très bon ami ou même un membre de ma famille. J’écoutai les propos de Meteor en me disant que cela n’avait pas la moindre importance. Au fond, c’était vrai que sans preuve, je ne ferais que gâcher du temps précieux à des gens qui n’en avaient strictement rien à faire de mes problèmes. Je ne pouvais pas égoïstement me mettre de l’avant pour quelque chose qui était le résultat de mon incompétence et de ma naïveté. Je ne voulais pas de procès, ni même quoique ce soit de juridique. Il était clair que cela irait directement à l’avantage de mon ex. Il faisait parti des gens de bien dans ce monde, des gens de pouvoir et d’autorité.

Je baissai les yeux et jouai avec mes doigts hochant légèrement de la tête aux dires du blond. Je comprenais ses allusions, ses propos. Au moins, j’avais arrêté de pleurer comme une madeleine malgré que les larmes étaient encore présentes sporadiquement. Je laissai un soupire s’échapper de la commissure de mes lèvres. Le genre de soupire profond et lourd qui sonnait comme l’aveu du désespoir. C’était moi face à la réalité. Moi face à mon ex qui gagnerait quoique je fasse.

J’allai frotter mon avant-bras, celui qui avait été fracturé avant que je ne le quitte. Cela remontait à un moment déjà, mais dans ma tête c’était toujours comme si c’était hier. Parfois quand il faisait froid, je ressentais un élancement désagréable. C’était ma culpabilité. J’en étais persuadé.

- J’ai eu le bras fracturé une fois…mais…c’était ma faute. Sinon…rien…de…de tangible. De toute façon, les gens diront que j’étais simplement maladroit. C’est rien…vraiment…

Je relevai mes améthystes vers Meteor lorsqu’il s’ouvrit un peu à moi. De la curiosité et de l’étonnement se firent visibles dans mes prunelles violacées. Je le regardais alors qu’il m’avouait avoir déjà subi des abus. Lui? Vraiment? Je n’arrivais pas à croire totalement ces paroles, mais ne le connaissant pas réellement, comment pouvais-je savoir ce qui était vrai du faux? J’avais envie de le croire, mais je restais tout de même distant face à la réalité de ses mots.

Les mots suivants, cependant, me firent chaud au cœur et sans m’en rendre compte, un petit sourire léger naquis sur mes lèvres. J’essuyai du revers de la main quelques larmes et j’hochai de la tête. Si cet homme pouvait croire que je pouvais m’en sortir alors, je devais y croire moi aussi. Je commençais à voir la sincérité dans ses paroles et son envie réelle de m’aider à aller mieux. Je reniflai un peu en hochant de nouveau de la tête. J’avais bien envie de passer du temps avec lui, mais boire? Je n’étais pas certain que cela soit bon pour moi.

- Je…Je n’ai aucune idée quoi faire aujourd’hui…Hm…J’avais juste eu l’envie de venir voir les fleurs et de…de tenter d’aller mieux.

Je posai mes orbes de pierres précieuses dans la glace bleutée du regard de Meteor et je lui fis un petit sourire plus naturel et gêné de surcroit. Le rouge me vint aux joues lorsqu’il proposa de draguer des mecs. Je…moi? Je ne voulais pas passer pour une catin ou un homme facile! Enfin…draguer…me faire draguer…ce n’était pas bien…hm…j’allais me faire avoir…! Je baissai les yeux et me mordillai la lèvre inférieure en jouant de nouveaux avec mes doigts.

- Je ne crois pas être prêt à vivre en pilote automatique et à fréquenter des gens pour…enfin…tu sais…C’est trop tôt…mais…on peut…apprendre à mieux nous connaître toi et moi…si tu en as envie? Mon psy m’a dit qu’il fallait que je m’ouvre aux autres et que d’apprendre à faire de nouveau confiance c’était un bon départ pour l’avenir…mon avenir.

Je devais encore avoir les joues en feu. J’étais gêné et embarrassé, mais au moins, je m’étais lancé alors qu’il travaillait pour TRISMEGIS. Oui. Je faisais le pas, le saut! Je devais oublier mon ex et la première étape était d’apprendre à faire confiance et éloigner mes peurs. Arrêter de généraliser et de tout mettre dans le même panier. Meteor pouvait très bien être une bonne personne malgré son affiliation à l’organisation n’est-ce pas? Il n’allait pas me faire souffrir ou m’utiliser n’est-ce pas? J’avais très fortement envie d’y croire et ce n’était qu’en lui faisant un peu confiance que j’allais pouvoir reconnaître le vrai du faux.

- Tu veux bien faire le tour du roseraie avec moi? Après je déciderai de la suite.

J’observe l’homme blond à mes côtés et je détourne les yeux lorsqu’il dit de but en blanc que c’est mon ex qui m’a poussé et qui a causé ma fracture au bras. Je n’ose pas m’avouer la vérité à ce sujet même si c’est la raison de ma fuite, de mon départ, de ma désertion. Je me contente de garder le silence et tente de ne pas penser au passé. Ce n’est pas le moment de retomber dans une crise psychotique et paranoïaque. Non…Je dois me contenir, me ressaisir et rester calme…ou du moins essayer du mieux que je le peux.

Je relève mes améthystes sur le lieutenant Quartz alors qu’il allait parler de sa sœur. Je cligne des yeux et tente de comprendre ce qui se passe, mais je n’y arrive pas vraiment. Il semble perturbé ou gêné, je ne sais pas trop. Je le laisse à ses émotions sans dire quoique ce soit. Ce n’est pas de mes affaires. J’ai appris à ne pas me mêler des affaires des autres et à écouter. Parler…C’était plus dur même si…j’arrivais parfois à socialiser. J’avais simplement la peur du faux pas et des représailles.

Et le revoilà qui redevient plus jovial, plus pipelette. Il essaye vraiment de me faire sortir de ma zone de confort ou bien de ces habitudes que j’ai prise avec les années et qui ont fait de moi une personne inerte, docile et peu encline à me rebeller. Je secoue la tête avec conviction alors que Meteor essaye de me distraire du mieux qu’il le peut. Je ferme les yeux et soupire avant de me mettre à parler un peu.

- Je n’ai pas revu Fleurestine depuis mon départ à Bedwyr. J’ai dû couper les ponts avec mes amis, ma famille, tous ceux qui m’étaient cher…pour lui convenir. Je ne sais même pas si nous sommes réellement encore amis. Qu’importe…

Je murmure ce dernier mot dans un souffle et je me levai ensuite pour m’accroupir auprès de mon Bulbizarre, lui caressant affectueusement la tête. Il semblait content de me voir calme et plus serein même si cela n’était que passager.

- Je n’ai pas encore trouvé de loisirs qui me plaisent…Je ne sais pas trop ce que j’aime…Je dois encore travailler là-dessus. Enfin…j’aime les pokémons…et…hm…mon travail.

C’était vrai que je n’avais aucune espèce d’idée de mes envies, de mes désirs, de ce qui pouvait me plaire ou non. Niveau loisir, je n’avais rien touché depuis treize années. J’étais à la ramasse dans ce domaine-là aussi. Ce que je pouvais être déprimant au fond. Une vraie cause perdue.

- Ça ne fait rien! Hm…j’aime bien les fleurs aussi. Les plantes…elles trouvent toujours le moyen de s’en sortir et de revivre après une catastrophe.

Je me redresse et tente un petit sourire à l’encontre de Meteor. Ce n’est pas grand-chose, mais je fais de mon mieux. Je me mets ensuite à marcher en observant les roses, glissant parfois un doigt sur un pétale ou une épine pour la caresser.

- Tu aimes la nature?

- À vrai dire…Je ne sais pas trop…hm…La dernière fois que j’ai revu Fleurestine…il…enfin…j’avais l’impression de subir un interrogatoire…Je n’ai pas du tout apprécié…et je venais tout juste de revenir à Agapé alors…

Je me sentais un peu gêné dans les faits. J’étais suspicieux de mon ami d’enfance de par son travail en tant que lieutenant pour Trismegis. Je n’avais pas du tout apprécié ses tonnes de questions à mon sujet et au sujet de mon passé. Anxieux et sur les nerfs, cela n’avait en rien aidé pour des retrouvailles plaisantes. Enfin, cela c’était tout de même bien passé, je crois…?

Je secouai la tête pour ne plus y penser. Meteor avait peut-être raison et peut-être bien que Fleur serait heureux que je le contacte de nouveau. J’allais voir…

- …

Je me mordillai la lèvre inférieure lorsque le châtain clair me sermonna un peu sur mon manque de loisir en dehors du travail. À vrai dire, je n’en avais pas vraiment, c’était vrai. Je n’avais pas eu ce plaisir lorsque j’étais encore avec mon ex. C’était plutôt boulot-appartement et parfois une sortie à l’épicerie pour se ravitailler pour le mois. Et cette activité-là, nous la faisions toujours à deux.

Je me mis à repenser à cette soirée pluvieuse où j’avais dû finir plus tard au boulot à cause de rapports urgents à terminer pour deux patients critiques. C’était la soirée épicerie avec lui et comme je n’avais pas eu le temps de le prévenir de mon retard, j’en avais bavé. Pas physiquement, mais psychologiquement…c’était tout autre. Il m’avait clairement reproché la fermeture de la supérette où nous allions parce que je n’avais pas réussi à respecter l’heure convenue pour aller faire notre épicerie. Cela l’avait mis encore plus de mauvaise humeur de devoir aller dans un autre quartier pour se rendre dans une grande surface qu’il détestait. À l’époque, je croyais dur comme fer que tout était de ma faute. Mes mots et mes actions lui portaient constamment préjudices. Ce soir-là, j’étais allé dormir le ventre vide et la tête pleine de cruauté de sa part.

Autant dire que je n’avais pas bien dormi et qu’au matin, j’avais l’air d’avoir passé dans une machine à laver. Je m’étais promis, encore une fois, de ne plus le décevoir et de toujours tout faire pour qu’il puisse être fier de moi. La belle connerie…

Je clignai des yeux en sortant de mes pensées, me rendant bien compte que je ne lui avais pas répondu. Je tournai la tête vers Meteor et secouai de la tête. Il n’avait pas à s’investir autant avec moi. Je lui devais déjà beaucoup avec tous ses conseils.

- Je trouverai moi-même…Je sors beaucoup plus…c’est déjà une bonne chose. Hm…J’imagine que je pourrais me mettre à la cuisine. Je cuisinais toujours…

Pour lui. Je frémis en détournant les yeux.

Je relevai cependant mes améthystes sur le lieutenant Quartz lorsqu’il se mit à plaisanter sur sa vision de la nature. J’esquissai un léger sourire à peine visible. Essayait-il de me remonter un peu le moral? Je me sentis rougir un peu et portai mon attention de nouveau sur les fleurs. Je ne me rendis pas compte de la couronne de fleurs blanches qu’une fois qu’elle fut installée sur ma tête. Je clignai alors des yeux, interrogatif.

- Hm?

Notre proximité me fit rougir d’autant plus, mais il se recula pour me laisser de l’espace. Tant mieux! Je n’aurais pas su comment réagir si Meteor était resté aussi près de moi que cela!

- Ah…euh…hm…alors, tu aimes les métaux et les pierres? Tu en fais collection ou encore tu as un talent caché qui requière gemmes et cailloux?

Trouver un sujet de conversation pour tenter de faire diminuer la rougeur sur mes joues et mon visage en général? Check. Voir si cela va fonctionner ou pas? Une tout autre histoire! J’allai toucher les fleurs de la couronne du bout des doigts et laissai un sourire un peu plus franc fleurir sur mes lèvres. Mon regard se fit plus apaiser.

- Les gens me disent souvent que mes yeux ont la couleur de l’améthyste. Pourtant…Outre la couleur, je n’ai rien de l’améthyste…ni ses bienfaits, ni ses vertus.

Je me fis songeur en écoutant ses paroles concernant Fleurestine. Peut-être avais-je mal pris en compte ses intentions à mon égard? Il pouvait être assez intense par moment et même difficile à lire. Ma paranoïa et mon déménagement soudain à Agapé avaient fait en sorte que je me retrouvais à fleur de peau, à vif. Peut-être que Meteor avait raison et que je ne faisais que juger à mal. Je me sentais un peu mal à l’aise et gêné pour mon ami d’enfance. J’allais devoir lui lancer un coup de fil prochainement pour lui proposer qu’on se revoie. Oui. Une fois bien calmé et de nouveau serein avec moi-même et en oubliant tout le reste. Voilà. C’était l’idée.

- Ça me rassure de savoir qu’il peut être compréhensif…Je tenterai de le recontacter prochainement…oui.

Nous avancions à notre rythme, parfois côte à côte et parfois le lieutenant Quartz devant moi. Je préférais rester soit derrière soit à la même hauteur que lui. L’angoisse me prenait si je devais sentir la présence de quelqu’un qui me suit derrière moi. Mon Bulbizarre nous suivait aussi, tranquille et enjoué à la fois. Il semblait vraiment très heureux de profiter de la roseraie. J’étais content pour lui et cela me faisait penser à autre chose.

Quand l’Agapéen me parla de sa famille et des générations de bijoutiers-joailliers et de mineurs qui peuplaient son arbre généalogique, j’exprimai ma stupéfaction et mon intérêt par la brillance de mes améthystes. Moi, je n’avais pas suivi le même chemin que mes parents. Je m’en étais même totalement éloigné. Outre pour l’art du théâtre et de la comédie, je n’avais jamais démontré le moindre talent artistique. C’était peut-être mieux ainsi de toute façon.

Quand Meteor parla de prothèses, j’eus une pensée pour la championne d’Agapé. Cornélia Gnaux si je ne me trompais pas. Elle aussi fabriquait des prothèses, non? Je crois que l’on pouvait considérer cela comme de l’art. De mon point de vue, bien sûr.

- C’est incroyable que tu ais la même passion que tes grands-parents et que tu ouvres ton champ d’expertise comme cela. Tu es un artiste, Meteor et hm…j’irai peut-être faire un tour à ta boutique quand j’aurai le temps.

J’allai placer une mèche de cheveux derrière mon oreille en gardant un doux et léger sourire sur mes lèvres. Je ne sentais plus la panique dans mes veines, mais bien la sérénité jusqu’à ce qu’il me complimente et laisse le rouge monter à mes joues. J’étais réceptif à ses belles paroles même si je me faisais violence pour tenter de ne pas le démontrer. C’était trop tôt pour passer à autre chose. Je devais tout d’abord guérir.

- Si…si je suis une pierre précieuse…hm…alors tu crois que je trouverai un jour le bijou qui me correspondra le mieux? Je ne sais pas trop…c’est ridicule dit comme ça…

Je secouai la tête en chassant mes pensées un peu trop fleur bleue et fantaisistes. Je devais me préoccuper de moi et non de l’amour ou quoique ce soit d’autre. Jamais plus je n’allais m’offrir à quelqu’un sans y être préparé. Si j’y arrive un jour…

Mon regard se posa sur le dos de Meteor tout comme sur sa chevelure châtain clair. Vu comme cela, il avait l’air d’un prince. Ce devait être le genre de personne qui se retrouvait facilement à l’aise dans une foule et entouré d’individus. Ce n’était pas mon cas. Je commençais à me sentir un peu mal de l’obliger à rester avec moi. Il pouvait partir s’il le voulait à vrai dire. Je m’étais arrêté de marcher sans m’en rendre compte et là, il était beaucoup plus loin de moi. Je baissai les yeux vers le sol, vers mon pokémon qui restait à mes côtés. Je pouvais faire un petit effort et me montrer gentil avec l’Agapéen, non?

- Hm…Meteor?

Je laissai ma phrase en suspend le temps qu’il se retourne vers moi.

-… Tu…veux venir chez moi?

Je n’avais aucune idée de ce que nous allions faire chez moi, mais s’il acceptait, j’allais bien trouver une idée en chemin. Évidemment, je n’étais pas prêt à quoique ce soit d’intime avec qui que ce soit, pas pour le moment, non. Un thé ou un petit moment à cuisiner ensemble, pourquoi pas? J’espérais seulement qu’il ne prenne pas mon invitation pour quelque chose de sexuel ou de louche. Ce n’étais pas du tout le cas.