Sur le lit d’hôpital à moitié présente mentalement, j’attends d’être plus lucide pour qu’on me laisse partir. La radio est allumée et déjà il commence à faire de la publicité pour Noël qui s’en vient. Il y passe aussi une chanson pour nous mettre dans l’ambiance. Par contre Noël en famille pour moi n’a jamais vraiment été joyeux.

-Au petit trot s'en va le cheval avec ses grelots. Y pogne une bosse y se pète les deux gosses sur le bord du traîneau… Ho di up, ho di up, ho di up ohé, allez Hop-pital Osti que ça fait mal !

Ma version n’est pas très joyeuse, je suis en plein délire. J’ai hâte de retrouver mon état normal. Je déteste me sentir comme ça. Même la Nanméouïe me regarde d’un air réprobateur.

Heureusement, ça ne dure pas trop longtemps. Après une bonne heure, je suis enfin moi-même et on me laisse partir. Il n’y a que la fatigue qui reste et le souvenir douloureux de ce qui s’est passé.

J’imagine que je dois prendre le chemin des soins intensifs maintenant, je vais sûrement recroiser ma belle-sœur et je n’en ai franchement pas envie. Aller un dernier effort pour ma mère et après je rentre me reposer.

Sur le chemin, on croise un pokémon qui frappe contre les murs. Il a l’air en colère et personne n’ose l’approcher pour le calmer. C’est un bébé pokémon en pleine crise de bacon. Je pourrais intervenir, c’est dans mes qualifications, mais c’est la Nanméouïe qui me prend de court. Je la laisse faire et elle y parvient la traînant maintenant avec nous. Jusqu’à où va-t-elle me suivre d’ailleurs? J’ai l’impression d’avoir l’ombre de ce que j’aurais pu devenir derrière moi, une mère et son enfant… J’ignore si j’en aurais de ma propre volonté un jour.

HRP: défi moyen, c'est la belle nuit de Noël (promenade à traîneau parodier)

 
Je me retrouve à nouveau aux soins intensifs avec deux pokémons cette fois qui me suivent. Je ne suis pas certaine que ma mère ou que même les infirmiers vont apprécier. Alors une fois devant la porte je leur dis qu’elles ne pourront pas le suivre à l’intérieur.

-J’ai apprécié votre compagnie, mais vous ne pourrez pas me suivre à l’intérieur. Vous pouvez partir à vos occupations, pas obligé de rester là à m’attendre.

Je ne sais pas trop si elles ont compris le sens de mes paroles, la Nanméouïe va simplement s’asseoir sur l’un des sièges extérieurs du bloc de soin avec la Ptiravi dans ses bras. Quant à moi, une infirmière m’ouvre. Ma mère et mon frère sont là. Pourquoi est-ce que l’un des deux n’est pas avec mon père? Ma mère qui voit mon air interrogateur me dit pourquoi.

-Ton père est réveillé et deux policiers l’interrogent. Il va falloir attendre. Elle se lève et m’invite à m’asseoir en attendant. Je ne refuse pas étant donné ma fatigue. Naturellement, elle se place entre moi et mon frère.

-Ça fait longtemps qu’ils sont là? Demandais-je.

-Une bonne vingtaine de minutes… Ma femme est passée en passant. Je me demande bien a cause de qui elle a cru que j’étais gravement blessée! Me reproche mon frère.

-Aucune idée… Je détournais sèchement le regard.

-Ça suffit tous les deux! Vous n’êtes pas à la bonne place pour vous disputer!

-Pardon mère
-Pardon mère. Avait-on répondu en cœur.

Quelque instant après l’un des inspecteurs revint. Ma mère se leva et demanda s’ils avaient fini. Le policier secoua de la tête de gauche à droite avant de remarquer ma présence.

-Je vois que votre fille est revenue. Pouvez-vous nous suivre. Ça devrait apaiser les craintes de votre père, il clame que vous avez aussi été enlevée, même si on dit l’inverse. Il ne nous croit pas. Fini par me demander l’homme.

J’appréhende un peu d’y aller, mais je n’ai plus le choix. Exceptionnellement, comme il s’agit d’une enquête, je suis autorisé à y aller même si les deux enquêteurs sont déjà présents. Je me lève et le suit tout le long du couloir des soins intensifs jusqu’à la « chambre » du fond. Comment est-ce qu’il va réagir? Comment je vais réagir en le voyant?

 

Je suis les deux policiers en silence. J’ai peur de voir mon père, encore plus qu’avant depuis que je me souviens de nouvelle chose qu’il m’a fait endurer, même s’il me manque encore certain bout de ma mémoire. Je ne sais pas trop comment je vais réagir en fonction de comment lui va réagir!

Puis finalement quand on arrive devant son lit, il a les yeux fermés, branché de partout avec plusieurs solutés, le masque d’oxygène sur le visage et la machine qui prend sa tension en continue. Il est plâtré de partout et pour assurer sa sécurité, il est immobilisé, le moindre mouvement trop brusque pourrait lui fracturer d’autres os, et ça, c’est dangereux pour sa vie. C’est silence dans l’unité des soins intensifs, on n’entend que les bips sonores cycliques des machines.

-Monsieur Anton. Interpelle le policier
-Je vous… ais déjà… dit… Commence mon père, la respiration saccadées, il a beaucoup de mal à articuler. Puis, il ouvre les yeux et me vois. La surprise et le soulagement se lit dans son visage et moi je reste de marbre. Ma petite… fleur… tu vas bien…

-Mieux que vous père… Je détourne le regard, je ne le regarde pas dans les yeux. Je ne dis rien de plus. Les deux policiers se regardent entre eux. Peut-être s’attendaient-ils à une réaction différente de ma part. J’aurais dû me mettre à pleurer en me jetant sur lui morte d’inquiétude peut-être ?!? S’ils savaient ce que lui me faisait, ils ne prendraient pas mon père en pitié. Je n’ai qu’une envie de l’achever, ça me soulagerait tellement, tout serait fini… En même temps, je veux qu’il souffre encore plus…

Mon père tente de lever le bras comme pour venir me touchée, s’assurer que je suis bien là vivante. Il est arrêté par ses entraves et moi, j’ai un mouvement de recul. Je n’ai pas envie qu’il me touche ou même m’effleure. Un autre regard incrédule des policiers avant que l’un d’eux prennent la parole.

-Votre fille est en sécurité et si vous nous parliez maintenant de ce qui s’est passer. Est-ce que vous en sentez capable?

Mon père hoche de la tête et il parle lentement de ce qui s’est passer. Je reste aussi à l’écouter, d’un coup qu’il se douterais d’un truc. Je veux savoir ce qu’il sait de son enlèvement. Finalement, je ne m’inquiétais pour rien. Sa version concorde à la mienne, il avait quitté la résidence seul ce jour-là, car j’étais fiévreuse. Deux hommes en cagoulés lui sont tombés dessus alors qu'il sortait de la résidence et l'ont embarqué dans une voiture avant de l'assommer. Il n'a aucune idée d'où il était retenu. Il se souvient juste de l'odeur de la poussière et de bruits métalliques. Il a été torturé par un homme qui sifflotait. Hormis ça et le supposé cri que j’aurais poussé, d’où il croyait aussi que j’avais été enlevée, il ne sait rien de plus.

-Je suis soulagé… de m’être trompé… surement la douleur m’a rendu fou… et m’a fait perdre la tête…

-Merci d’avoir répondu. On aura sans doute d’autres questions, mais on va vous laisser vous rétablir avant. Les deux policiers partent devant. J’ai tout aussi envie de partir, mais j’imagine que ça ferait étrange de partir tout de suite, alors j’attends encore un peu et je me retrouve seule avec mon bourreaux…

Ce que je fais ensuite, me surprend moi-même. Je me penche vers lui, ma bouche tout près de son oreille et je lui murmure quelques mots.

-Je me suis souvenu de beaucoup de choses ces derniers jours et j’ai avortée le petit dernier que vous m’avez fait. Rétablissez-vous vite, que l’on se revoit en cours…

Ça avait assez duré et plus jamais il ne me touchera. Je n’attends pas de voir sa réaction avant de partir, mais il semble s’affoler assez pour faire biper la machine et que les infirmières se précipite pour lui donner un calmant.