La journée commence sur les chapeaux de roue. Une association de défense des droits des pokémons a saisit un élevage illégal de pokémons canins. Il les ont retrouvés dans un sale état : plus d'une douzaine de toutous sont en soins intensifs. Il va falloir tous les examiner, j'ai à peine le temps d'ingurgiter mon café que je suis appelée dans tous les sens. Huit heures trente du matin, j'enfile ma blouse et part soigner toutes ces pauvres bestioles sans défense. J'appelle Nanméouïe qui m'assiste à chacune de mes interventions.

Je connais ce pokémon depuis une belle lurette. Durant mes années d'étude, on me l'a présenté car chaque interne possède un assistant pokémon. Je suis tombée sur Céleste, une Nanméouïe altruiste et sensible. Elle est très investie dans son travail et m'obéit au doigt et à l’œil. À la fin de mes études, j'ai voulu l'adopter mais l'hôpital a refusé à cause de mon inexpérience en tant que dresseuse. Je compte réitérer ma demande maintenant que je possède des pokémons. Notre lien est indéfectible, je me suis attachée à sa petite bouille innocente. Nous avons connu des cas difficiles mais jamais rien de tel.

Les chiens sont enfermés dans des cages, certains sous assistance respiratoire, d'autres sous sédatif. Ils sont pour la plupart en mauvaise santé. Les secouristes sont intervenus à temps : quelques jours plus tard et la plupart serait déjà mort. Céleste utilise ses capacités pour guérir les blessures les plus superficielles. J'injecte pour certains des calmants afin d'apaiser leurs douleurs. Je désinfecte les plaies dont certaines sont biens infectées. J'ai envie de vomir, n'osant pas imaginer l'horreur qu'ils ont dû vivre. Apparemment, ils auraient été entassés dans des enclos bien étroits, certains ont même été battus par les éleveurs. Mon regard se noircit d'avantage, mes envies de meurtre sont de plus en plus envahissantes. Céleste le ressent : sa menotte se pose sur ma jambe et ses yeux me contemplent, l'air compatissant. Pour l'instant je tiens bon malgré le rythme effréné, jusqu'à ce que mes mirettes se posent sur un Pâtachiot.

• Demande de rencontre

Il est là, prostré dans sa cage, le regard vide. Mon cœur se sert en voyant ce petit bout sans éclat de vie. Aux antipodes du Pâtachiot de mon papy. Soudain, mon instinct maternel jaillit, souhaitant prendre ce pauvre pokémon sous mon aile pour le protéger et lui mener une vie paisible. Mon instinct de maman fonctionne qu'avec les pokémons, surtout lorsqu'il s'agit de mon toutou préféré. J'ouvre délicatement la cage en prenant une voix suave.

━ Coucou mon p'tit père.

Au moment où la porte de la cage se met à grincer, le Pâtachiot se réfugie au fond de sa prison, les pattes tremblotantes. Il fait peine à voir, ses réflexes traduisent une maltraitance conséquente. Ces bébés sont tous issus de mère forcée à se reproduire. Ils ont été séparés très tôt de leur maman, obligés de vivre entassés avec leurs congénères. Observant les automatismes de ces pokémons canins, ils ont du être battus. J'approche ma main pour laisser le temps au petit canidé de me sentir, de s’habituer à ma présence. Une fois qu'il s'est habitué, je le porte doucement dans mes bras pour l'amener à une table de consultation. En attendant de l'y amener, je lui susurre de doux mots.

━ Là, là … je vais te regarder et te soigner. C'est fini. Plus personne ne te fera de mal.

Il ne risque pas de comprendre mais le timbre de ma voix suffit à le mettre en confiance. Une fois sur le tapis d'observation, je commence à analyser chacune de ses blessures. Ces dernières sont moins importantes que sur d'autres canidés mais ce n'est pas une raison pour les négliger. Le Pâtachiot est craintif, craignant le moindre contact. J'y vais tout doucement, patiemment, enroulant un bandage autour de sa patte et appliquant de la pommade sur ses plaies. Enfin, ma main caresse délicatement sa caboche.

━ Tu as été courageux p'tit père … tiens, une friandise. C'est bien petit toutou !

Je cache toujours des friandises dans ma poche. Ainsi, les pokémons que je consulte sont en confiance et se laisse diagnostiquer. D'abord hésitant, le chiot renifle le bonbon avant de l'avaler. Il semble affamé, la peau sur les os, comme la plupart des chiens qu'on a recueilli. Habituellement, ce n'est pas à moi de faire ça mais je prends soin de nourrir et d'abreuver chacune de ces pauvres créatures. Cette situation m'affecte plus que d'habitude.

Je retourne dans mon bureau, discuter avec les membres de l'association. Ils me résument ce qu'il s'est passé et je leur explique le diagnostique de chaque pokémons. Ils devront rester un moment au centre hospitalier. Pour ces secouristes, ce n'est pas la première fois. Il existe des personnes malveillantes, obnubilées par l'argent au point de mettre en danger des créatures sans défense. À Bedwyr, les gens ne sont pas aussi sensibilisés à la cause pokémon que dans les milieux ruraux. Le marché du pokémon canin étant en plein essor dans la ville, de plus en plus de cas comme celui-ci sont signalés au centre vétérinaire. Je suis scandalisée, répugnée, révoltée mais je le cache. Il faut rester professionnel, sauf lorsqu'il s'agit de sauver un Pâtachiot. Avant de quitter les sauveurs, je leur demande ce qu'il en adviendra de ces bestioles. Évidemment, ils seront tous mit au refuge. Un peu hésitante, je demande tout de même si je peux en adopter un. Ils n'y voient pas d'inconvénient, juste de la paperasse à remplir. Ayant un peu de temps devant moi, j'en profite pour compléter les documents d'adoption. Tant pis pour ma pause café.


• Capture du Nanméouïe (1/5 pokéball)

Une fois les papiers remplis et rendus, j'ai le cœur plus léger. Ma bonne action de Noël est réalisée, je vais pouvoir donner une meilleure vie à ce Pâtachiot qui en a bavé tout du long. Dans les couloirs, j'exprime mon enthousiasme et mon soulagement à Nanméouïe. Celle-ci serre les feuilles qu'elle porte contre sa poitrine, les mirettes rivées sur ses pieds. Alors que je change de sujet, lui listant toutes les choses que nous devons accomplir aujourd'hui, Céleste m'interrompt par un couinement des plus mignons. Je m'arrête, tentant de déchiffrer ce qu'elle a à me dire. La Nanméouïe gesticule et mime de grand geste pour exprimer ses propos. Captant finalement ses dires, un long sourire fin se dessine sur mes lèvres. Le même qu'on voit sur une maman attendri par son mioche. Céleste veut être à mes côtés. Lorsque je lui raconte mes projets, celle-ci s'imagine les vivre avec moi. Elle aussi veut partir, elle aussi veut explorer le monde sans se cantonner à un univers restreint, elle aussi veut s'extirper de son train-train quotidien. Accroupie à son niveau, ma main caresse tendrement sa caboche rose.

━ Ne t'en fais pas, je te le promet. Lorsque je partirai explorer l'île, ça sera avec toi.

Ainsi j'ai refais sa journée. Nous pouvons continuer notre travail en toute quiétude, sans compter le repas horrible qui m'attend en début de soirée. Voilà qui noircit mon tableau immaculé. Pour une fois, je préfère me focaliser sur le présent. Je reviens rendre visite au Pâtachiot, bien épuisé par tous les événements lui tombant dessus. Mes phalanges se faufilent à travers la grille en espérant effleurer son poil qui sent bon la brioche.

━ Je reviens te chercher en fin de semaine. Ne t'en fais pas, le meilleur reste à venir. Repose toi bien, p'tit père. je murmure.

Ainsi, je repars subir ma journée harassante. Elle consiste notamment à remplir un maximum de paperasse administratif – chiant au possible –, gérer les pokémons de l'association et consulter les minets des mamies qui s'ennuient. Malgré mon implication au travail, mon esprit est ailleurs. Il se focalise sur le pokémon que j'ai sauvé et mon acolyte de boulot qui souhaite me rejoindre dans mon aventure. Tous ces événements risquent de bousculer ma vie. Enfin. Il est grand temps que je me casse d'ici, mais je veux m'organiser correctement. Au lieu de noter mes futurs rendez-vous dans mon agenda, je préfère écrire les choses à réaliser avant de partir. C'est-à-dire : demander une mutation ou des missions qui me feront bouger dans toute la région, prévenir papa que je vais bel et bien partir – contrairement à la première fois –, préparer ce qu'il faut pour bien vivre en tant que nomade et j'en passe. Ces perspectives me remettent de bonne humeur, jusqu'à ce que je constate l'heure tourner et s'avancer dangereusement vers l'heure du dîner.


• Nouvelle demande d'apparition