Je m’étais enfin décidé à me rendre à la boutique dont m’avait parlé Jinguo. J’avais pris mon temps pour y réfléchir et prendre ma décision. Rien ne pressait. C’était maintenant l’hiver ou plutôt, l’hiver était bien installé depuis un petit moment déjà ici et là. Uchinâ ne semblait pas vraiment avoir été touché par le froid. C’était la première fois que je mettais les pieds là-bas. L’endroit était bien différent de ce que je m’étais imaginé. C’était ensoleillé et l’air était pur et frais. Par contre…il y avait beaucoup de bruits. Des festivités, je crois.

Je regardai le morceau de papier que j’avais dans les mains. J’avais préféré noter l’adresse sur quelque chose de physique que je pouvais tenir dans mes mains. Ma holo-montre contenait elle aussi les informations. Au moins, je pouvais jouer avec le papier pour extérioriser ma nervosité. Ce qui aurait pu me coûter cher si j’avais eu l’idée de faire la même chose avec ma montre.

Je levai mes améthystes vers les panneaux des diverses boutiques de l’endroit. Quelques vendeurs essayaient d’attirer mon attention pour me vendre toutes sortes de choses. J’essayais poliment de refuser, même si je me sentais un peu mal de le faire. Certains étaient très insistants. Je pris donc la décision d’accélérer le pas pour ne pas trop traîner. Je ne connaissais personne et à la foule qu’il y avait, il était presque impossible que je tombe sur l’agent funéraire en pleine rue comme cela.

Mon regard passait d’une pancarte à une autre et d’une adresse à l’autre. Je m’arrêtai brusquement devant une boutique. Il semblait y avoir quelque chose d’unique et de mystérieux avec cet endroit. Je posai mes orbes violacés sur mon bout de papier et soupirai de soulagement en voyant que les adresses correspondaient.  Le jardin d’Asclépios. Je ne connaissais pas, mais selon Jinguo, le propriétaire des lieux pourrait m’aider avec ma nervosité et peut-être le reste aussi.

Je sentis remuer dans mon sac posé contre mon dos. Je l’attirai pour regarder à l’intérieur. Ma Rozbouton c’était de nouveau glissé à l’intérieur pour m’accompagner dans mes déplacements. Je soupirai avant de lui faire un petit sourire. Elle ne me le retourna pas. Tant pis. J’allai lui caresser le dessus de la tête avant de prendre une grande respiration et d’entrer dans la boutique.

- Bonjour? Il y a quelqu’un…?

Il y avait toutes sortes d’odeurs, mais rien de désagréable. Je vivais avec une Miamiasme alors…mon odorat avait connu bien pire que quelques herbes et épices. Instinctivement, je serrai mon sac dans mes bras et donc mon pokémon qui ne sembla pas trop d’accord, se mettant à bouger plus vigoureusement.

- Calme-toi Thiri…Je te dépose au sol, d’accord?

Je me penchai et déposai mon sac sur le sol de l’établissement pour que ma petite Rozbouton puisse en sortir. Elle sauta sur le plancher de ses petits membres et me regarda sans l’ombre d’un sourire. Elle était si petite et si mignonne, mais aussi froide qu’un glaçon avec moi.

Ce que Trix porte:

Je relevai mes orbes améthyste vers le Roserade qui nous faisait une révérence alors que son partenaire humain nous disait être à nous dans quelques instants. Je saluai de la main les pokémons que je voyais dans la boutique. Un petit geste à peine élaboré et assez timide. Je me redressai de tout mon long pour poser par la suite mon regard violacé sur l’homme à la chevelure émeraude. Je ne pus m’empêcher de rougir en le détaillant des yeux. Je me maudissais d’avoir cette attirance pour les hommes aux cheveux verts et au corps bien ciselé. J’avais l’impression d’avoir un mannequin face à moi.

- Oh…hm…C’est la première fois que je viens ici…et à Uchinâ en fait. Un ami m’a recommandé votre boutique pour m’aider avec certains petits problèmes.

Je suis un peu gêné face au charisme que l’autre homme dégage. Même sa voix est agréable à entendre. Je me demande sur le coup si tous les Uchiniens sont plus ou moins semblables, physiquement parlant. Jin n’était pas mal non plus…

Je sens que la chaleur ne quitte pas mes joues et je profite du commentaire lancé par l’herboriste pour me calmer un peu les hormones.  Je posai les yeux sur Thiri et je souris avec douceur en la regardant. Elle s’était approchée du Roserade du dresseur et elle le toisait sans bouger.

- Ah, oui…enfin c’est l'une de mes deux pokémons plantes. Je devais venir seul, mais elle a décidé de se glisser dans mon sac sans que je m’en rende compte. Elle le fait souvent, malheureusement…

Je secoue la tête, un peu dépité par l’attitude de ma Rozbouton, mais je l’aime quand même. Elle n’est simplement pas démonstrative.

- J’aimerais la voir sourire, mais je crois qu’elle est comme ça. Distante et froide.

Je relevai de nouveau mes améthystes vers l’homme derrière le comptoir et je souris doucement.

- Excusez-moi, je suis un peu anxieux. Je n’ai pas l’habitude d’aller dans des endroits qui me sont inconnus…et seul de surcroit.

Autant tout mettre sur le dos de la nervosité. Oui, voilà. Je réagissais comme cela parce que j’étais nerveux et non pas parce que l’homme face à moi était totalement le genre de personne qui m’attirait physiquement. Je devais me reprendre et prendre une grande inspiration pour recouvrer mes esprits. J’étais là pour des produits naturels qui sauraient m’aider avec le stress et tout le reste.

- Je m’appelle Trix…Trix Diabella. Enchanté de vous connaître monsieur l’herboriste. Vos pokémons sont vraiment accueillants.

Ce que Trix porte:

- Oui…vous avez raison. C’est un ami en or.

Je ne connaissais pas encore bien Jīnguó, mais j’avais confiance en lui. Si j’avais besoin, je pouvais le contacter à tout moment, mais je préférais éviter tout de même de le faire. Je devais apprendre à me faire confiance et à prendre des initiatives sans le soutien d’une autre personne.

Ma petite Rozbouton s’était mise à faire le tour de la boutique, ne faisant pas attention aux humains et autres pokémons alentour maintenant qu’elle avait pu observer le Roserade. Thiri ne semblait pas exaltée ou impressionnée par ce qui se trouvait dans l’herboristerie. Elle s’arrêta devant une étagère la fixant sans le moindre sourire. Je souris en la regardant faire avant de reporter mon attention sur l’homme à la chevelure verte.

- Cette boutique est fabuleuse. Elle dégage une aura chaleureuse et accueillante. Je me sens déjà mieux juste à y avoir mis les pieds.

Tout dans la boutique semblait méthodiquement placé ici et là. Ce n’était pas engorgé par endroit ou bien un total fouillis. Je trouvais que c’était organisé et un bel établissement enivré d’odeurs exotiques et familières. L’espace offert permettait un beau visuel et je ne parlais pas du commerçant en tant que tel…quoique…

Je sentais encore la chaleur sur mes joues à cette pensée et la chassai rapidement.

- Cela ne fait pas encore une année depuis que j’ai mes partenaires pokémons. C’est plutôt récent, sans l’être totalement non plus. Ils m’aident pour mon travail.

Je garde un doux sourire sur mes lèvres, pensant à tous ceux qui étaient restés à la maison. Ils me manquaient déjà.

Je me racle la gorge et l’Uchinien vient vers moi, se rapprochant. Je lui serre la main quand il se présente, un sourire poli sur les lèvres.

- Oui, j’ai des problèmes d’anxiété et beaucoup de pression au quotidien. J’aimerais pouvoir relâcher la pression et retrouver une certaine tranquillité d’esprit. Surtout lorsque je suis à la maison. Nous ne gérons pas tous le stress de la même façon et j’ai beaucoup de difficulté…je l’avoue.

Je ne pouvais pas lui mentir sur ce fait. Mes troubles anxieux me pourrissaient la vie et me rendaient encore plus maladroit et tête en l’air. Je devais retrouver une concentration normale et une routine de vie moins chaotique. Cela pouvait m’aider à reprendre confiance en moi et à voyager partout sans avoir peur des conséquences imaginaires que mon cerveau créait. Les herbes avec mes séances de thérapie pouvaient être un combo efficace si?

- Je n’ai pas besoin de quelque chose de trop fort…juste quelque chose pour calmer mes angoisses sans que cela entraîne de la somnolence. Enfin…je ne sais pas si c’est trop demandé…

Je me mets à jouer avec l’une de mes manches, un peu gêné d’être critique et trop demandant. J’avais peur qu’on me dise que si j’étais trop pointilleux, que je n’avais qu’à faire mes recherches moi-même et de commander sur Internet.

Je détournai les yeux ou plutôt, les baissai pour regarder mes mains. Tout d’un coup, celles-ci me semblaient très intéressantes.

L’homme devant moi à l’air vraiment gentil et très à l’écoute de sa clientèle. C’est normal. Ce ne doit pas être qu’avec moi qu’il possède ce superbe sourire chaleureux et ces bonnes intentions. Je ne dois pas me faire d’idées. Trix, tu n’es personne pour lui, ne sois pas ridicule. Je détourne de nouveau le regard et observe la Rafflesia arroser les plantes de la boutique.

- Mes pokémons sont précieux à mes yeux. Vous comprenez.

Je reporte mon attention sur le bel Uchinien qui commence à m’énumérer quelques produits naturels pour m’aider à mieux dormir ou encore pour mon anxiété. J’hoche de la tête, un peu timidement je l’avoue. Je ne pensais pas que mes problèmes de sommeil étaient aussi à prendre en compte, là et maintenant. J’aurais cru que cela était en lien avec mes problèmes d’anxiété et que ça se règlerait d’eux-mêmes.

Dans ma situation actuelle, tout est bon à prendre et je secoue négativement de la tête lorsque le top modèle me demande si je prends quelque chose présentement. Non. Je ne veux pas être l’esclave de la médication et de toute façon, ma thérapeute n’a pas la permission de faire des prescriptions médicales. J’étais déjà assez perturbé comme cela, pas besoin de me retourner le cerveau encore plus avec des réactions chimiques et moléculaires artificielles.

- Je ne prends rien, non. Ce n’est pas mon genre...

J’arrête de jouer avec ma manche et m’accroupis lorsque ma petite Rozbouton revient vers moi. Je la prends dans mes bras et lui fais un doux sourire. Elle me regarde de ses yeux froids comme si elle me jugeait de simplement exister. Cela me fait sourire encore plus et je pouffe un peu de rire à la voir si peu expressive. Je l’aime tellement ma jolie Thiri!

- Je vais prendre tout ce que vous me recommandez. Je préfère l’approche naturelle et humaine pour m’aider à gérer mes problèmes.

Je pose mes améthystes sur Pyrus une énième fois et je me mordille la lèvre inférieure légèrement. À vrai dire, je n’ai pas envie de partir tout de suite. L’endroit me fait du bien et m’apaise tout comme la personnalité chaleureuse et bienveillante de l’herboriste. Je me rapproche un peu plus de lui et je vais glisser l’une de mes longues mèches de cheveux violettes derrière mon oreille gardant Thiri contre moi.

- Je m’avance peut-être un peu trop…mais puisque-vous le proposez…J’aurai besoin d’un guide pour me faire visiter Uchinâ et m’orienter vers les endroits les plus splendides du district…

Je n’en revenais pas de mon audace sur le coup. Enfin, l’homme face à moi pouvait clairement me recommander quelqu’un et non pas sa propre personne, mais j’avais un peu espoir. Je me trouvais bête aussi, mais Meteor me dirait de foncer, de voir ce que cela pouvait donner d’essayer d’attirer un peu l’attention sur moi et sur ce que je désirais.

Je voulais simplement passer encore un peu de temps avec cette personne fort aimable et au physique agréable à l’œil. Lui au moins, ne me prenait pas de haut et semblait être quelqu’un de respectueux et gentil. Quoique…j’avais pensé la même chose de Terry au tout début…et les premières années ensemble…

Je chassai ces pensées de ma tête me disant que c’était impossible de revivre deux fois de suite le même scénario n’est-ce pas?

- Vous auriez une personne en tête…?

- Je comprends ce que vous voulez dire. Ce n’est juste pas moi…de…vous savez…utiliser des remèdes artificiels. J’ai espoir en la médecine naturelle pour m’aider dans mes épreuves du quotidien…

Je souris légèrement, un peu rouge aux joues. J’essaye de dire un peu plus ce que je pense, de me fier à moi et à moi seul pour gérer mes problèmes et les situations dans lesquelles je me trouve. Je sais que je fais des progrès, ma thérapeute me l’a fait remarquer dernièrement.

Thiri qui se trouve toujours dans mes bras se met à bailler. J’ai les yeux brillants de tendresse en la voyant faire. Elle bouge un peu et décide de bondir sur le comptoir pour aller regarder ce que le vendeur a mis sur celui-ci. Elle touche à tout et observe de son air froid et impénétrable.

- Si vos produits fonctionnent bien, je risque de devenir un client régulier.

Après son inspection, ma Rozbouton retourne près de moi et je lui caresse la tête délicatement. La présence du Rosélia ne semble plus l’intéresser, ni même celle des autres pokémons de type plante.

Je relève mes orbes améthyste vers l’homme à la peau basanée, lui offrant un délicat sourire alors qu’il me dit connaître quelqu’un pour me faire visiter Uchinâ. C’est ma toute première fois dans le district alors tant qu’à avoir fait le voyage, j’ai envie de voir du paysage.

Et puis, mon cœur s’accélère lorsque l’Uchinien se propose lui-même pour être mon guide. Je sens la chaleur me monter aux joues une nouvelle fois, surtout avec son joli sourire joueur. Je ne peux pas nier qu’il me fait un drôle d’effet et que son charme ne me laisse pas indifférent. Je suis heureux qu’il veuille bien me tenir compagnie dans ma visite guidée de ce bout de région.

- Merci Pyrus…Je ne suis pas pressé alors, j’ai tout mon temps. Ne rendons pas triste vos prochains clients. Je vais me trouver un endroit tranquille dans un coin de l’herboristerie et vous regarder travailler…

Oui bon…Je n’avais pas grand-chose d’autre à faire de toute façon alors, j’allais très certainement l’observer de temps à autre.

Je payai mes achats tout de même avant de le laisser reprendre son boulot. J’espérais que sa journée de travail se termine assez rapidement en fait. La boutique fermait à quelle heure déjà? J’allai voir sur le net, intrigué.

Puis, après un temps, ce fut le temps de la fermeture et je me rapprochai du comptoir de nouveau, mon sac de produits naturels à l’épaule.

- C’est quand vous voulez, Pyrus…

Ma Rozbouton était de nouveau dans mon sac, sûrement en train de faire la sieste. Impossible que je l’oublie ici…la honte si cela arrivait.

- Voulez-vous que je vous attende à l’extérieur le temps de bien tout fermer?

Je pointai la porte, incertain de savoir si c’était préférable ou non ou si je devais simplement l’attendre là.

Cet homme à la longue chevelure verte me rend bien à l’aise dans son herboristerie. J’arrive à me détendre quelque peu et à sourire de tant à autre. Je ne sais pas trop si c’est grâce à l’ambiance apaisante de l’endroit ou beaucoup plus grâce au vendeur qui s’y trouve, mais je ne me fais pas trop d’illusion. Je ne suis personne pour lui et même s’il est beau et craquant, je ne peux pas tomber amoureux d’une apparence physique. Le mot est fort, mais je n’arrive pas trop à mettre le doigt sur ce que je ressens. Sûrement de l’attirance physique qui ne me laisse pas indifférent, mais cela peut être traître aussi.

Je fais un doux sourire à l’herboriste uchinien et j’hoche légèrement de la tête à sa question.

- Plus vite que vous ne le croyez. Du moment que vous ne déménagez pas la boutique dans les mois à venir. Je saurai vous trouvez.

J’avais l’adresse du lieu après tout. Ce ne serait pas difficile de retrouver l’endroit puisque j’y avais mis les pieds une toute première fois. De plus, si j’oubliais, Jinguo pourrait me la redonner facilement et j’avais de la ressource, enfin, je crois. Me prendre en mains et me faire confiance c’était assez nouveau pour moi, mais c’était nécessaire pour mon rétablissement mental et physique.

Et puis, mon audace avait parlé pour moi tout comme ma gêne s’était reflétée sur mon visage. Je ne quittai pas l’établissement, m’installant simplement dans un coin pour l’observer de tant à autre. Je m’occupais de ma petite Rozbouton en attendant, lui murmurant des petits mots doux au creux du bourgeon. Je l’aimais tellement ma petite Thiri!

J’avais ri aussi au commentaire de l’homme quand il avait dit ne pas avoir de problème a avoir un petit admirateur secret et même d’en être honoré. Cela m’avait fait rougir de plus bel. Je ne me qualifiais pas de petit niveau grandeur, mais je devais avoir une petite personnalité par contre. Rien de bien grandiose. J’étais assez doux de nature et délicat. Enfin, je l’avais été par le passé, il y a bien longtemps. J’espérais redevenir comme avant ou le plus près du moi d’avant.

Puis l’heure de la fermeture arriva et je sortis à l’extérieur, attendant sagement mon futur guide aux traits aguichants et à la charmante personnalité. Je me demandais bien si tous les Uchiniens étaient comme lui.

Puis, lorsque le bel adonis passe au tutoiement, je sens la chaleur me monter aux oreilles et aux joues. Je cache mon visage dans mon foulard et je me sens timide d’un seul coup. Plus besoin de professionnalisme client-vendeur n’est-ce pas? La boutique était fermée à présent et donc, il ne restait que deux hommes agréables à l’œil qui se tenaient l’un à côté de l’autre.

- Je…hm…Je veux voir l’endroit le plus spectaculaire d’Uchinâ et aussi, celui qui amène de beaux souvenirs dans la tête des gens. Le genre qui fait rêver et qui rend heureux.

Je ne connais pas le district alors, difficile de savoir réellement ce qu’il y a voir. J’aimerais lui dire qu’il a carte blanche, mais en même temps, ce serait lui donner avantage sur tout. Étais-je capable d’avoir une confiance aveugle en un individu que je rencontrais pour la toute première fois? Ce ne serait pas une première en soi. J’avais déjà fait la même chose avec Jinguo, non?

- Je te laisse carte blanche pour m’en mettre plein la vue…et m’emmener là où je n’aurais aucun regret…

J’espérais que Pyrus comprenne mes propos et qu’il ne se mette pas en tête des choses insolites ou bizarres. Je voulais juste avoir une belle expérience touristique à Uchinâ et en bonne compagnie de surcroit.

- Je te suis.

J’avais commencé à le tutoyer moi aussi. Garder le vouvoiement aurait été bizarre, je pense. Je préférais me mettre au même pied d’égalité avec lui. Un fin sourire étirait mes lèvres alors que je serrais mon sac contre moi tout comme celui contenant mes achats. Au moins, ce n’était pas lourd ni encombrant.

Nous sommes enfin dehors et la température reste tout de même clémente en cette fin de journée. Ne connaissant pas Uchinâ, ni ses attraits touristiques, je laisse Pyrus s’occuper de faire la visite guidée. En soi, je ne suis pas du tout difficile. J’aimerais simplement pouvoir voir ce qui fait de ce district ce qu’il est en plus de sa splendeur natuelle. Au fond de moi, j’espérais ne pas déranger l’homme à la chevelure émeraude. Il s’était proposé pour me faire visiter et j’en étais plus que ravi, mais la simple idée qu’il le fasse par sentiment d’obligation me faisait hésiter à en profiter totalement.

Mes yeux couleur améthyste se posèrent sur l’homme à la peau couleur sépia et son sourire éclatant d’une blancheur immaculée me fit frémir. Non. C’était évident que je ne le forçais pas à faire cela. Il était totalement libre de faire ce qui lui plaisait. Je devais me sortir de la tête que j’étais un fardeau, une lourdeur accablante pour autrui. Ce n’était pas vrai du tout.

J’inspirai lentement et laissai échapper l’air contenu dans mes poumons dans un soupir léger et discret. Je devais me laisser porter. Plus de prise de tête. Plus de doute et d’hésitation.

Quand l’Uchinien me proposa d’aller à la plage, j’hochai de la tête, heureux de pouvoir voir la mer et son eau azur et turquoise. Nous allions nous balader sur le sable crème encore chaud des derniers rayons de soleil de la journée. Je crois que je n’étais jamais allé sur une plage de la sorte…ou une plage tout court. Ce serait alors une première pour moi.

Je fis un doux sourire à Pyrus et tout en marchant à ses côtés, mes joues se teintèrent de rose lorsqu’il évoqua la romance du lieu et de la possibilité de tomber sur un couple des plus entreprenants. Je me racle la gorge, mais ne pipe pas mot. Qui suis-je pour juger de la frivolité et de la passion des gens? Personne.

Mes yeux violacés ne quittent pas une seule seconde les faits et gestes de l’autre homme si bien que je me mets à déglutir, sous le charme et sans défense contre les ravages de son charisme audacieux. Un Goélise se met à s’époumoner au-dessus de nos têtes et cela me ramène à moi. Je lève le regard pour observer ses plumes blanches, bleu ciel et son bec jaune-orangé. Trente secondes plus tard, il a disparu.

Je n’en fais pas trop de cas et écoute attentivement ce que me raconte l’herboriste. Chaque lieu, chaque endroit, il semble tout connaître. Je suis fasciné par sa personne et ses mots. Il possède une aisance et une éloquence que je n’ai pas vu souvent dans ma vie. Outre chez mon ex cela dit.

Une fois sur la plage, je le regarde fermer les yeux pour savourer l’air marin et j’en fais tout autant. Mes paupières se ferment et je laisse le vent caresser mon visage, jouer dans ma chevelure couleur lilas et s’engouffrer sous mon manteau et mon foulard. Je sens l’odeur salée de l’eau un peu plus loin de nous.

C’est magique. Magnifique même. Je souris bêtement alors que je rouvre les yeux pour suivre mon guide sur le sable de la plage. Je pose mes orbes sur la bâtisse à quelques mètres de nous et Pyrus m’explique qu’il s’agit du bar le plus branché et fréquenté du district. J’hoche de la tête, mais n’ose pas prononcer le moindre mot. J’ai trop peur de briser l’instant, le moment et de dire le truc de trop qui pourrait rendre cela banal et ennuyeux pour l’homme à la chevelure verte.

Plus j’observe le bâtiment, plus il m’intrigue. J’ai envie de voir ce qu’il y a à l’intérieur. Ce qui le rend si mémorable, si unique.

Je sens Thiri qui remue dans mon sac et je l’entrouvre pour qu’elle puisse observer à l’extérieur. Ma Rozbouton semble juger les environs quelques secondes à peine avant de retourner se terrer au fond de mon bagage. Je resserre mes effets personnels contre moi.

Puis, j’avance d’un pas peu assuré vers l’entrée du bâtiment. Chaque pas me rapproche de plus en plus jusqu’à me retrouver devant la porte. J’essaye alors de voir si c’est déjà ouvert où si je perds simplement mon temps. J’ai peut-être l’air stupide, planté là devant la porte. Je tourne la tête vers l’herboriste.

Y entrer était-il réellement une bonne idée? Je ne possédais pas la réponse à cette question. Mes améthystes croisèrent le regard hétérochrome du natif et je m’y perdis une nouvelle fois. Je n’avais pas envie de réfléchir. Je pouvais me le permettre n’est-ce pas?

La pique de l’homme à la chevelure émeraude me fait rougir jusqu’aux oreilles alors que je porte de nouveau mon attention sur lui. Je suis bien heureux de porter un foulard autour de mon cou, pouvant y cacher quelque peu mon visage alors que je me sens des plus embarrassés par ses propos éloquents. Tout cela est vite oublié, cependant, lorsque nous nous retrouvons sur la plage et que ma curiosité vis-à-vis du Barbi-Chat se fait ressentir. Je ne peux que me rendre à sa porte pour voir s’il est ouvert à cette heure de la journée ou si au contraire, il ne l’est pas encore.

Absorbé par mes propres réflexions, je ne me rends pas compte de la proximité de l’herboriste et je ne relève les yeux vers lui que lorsque sa main effleure la mienne. Mes améthystes le scrutent quelques instants et mon corps frémit tout entier à son touché plus franc cette fois-ci. Mon cœur s’accélère dans ma poitrine. Il s’emballe comme une lycéenne le ferait devant son crush du moment. C’est un peu le cas pour moi, mais ce n’est simplement que physique, hormonal. Un désir de bas instinct qui me rend bien honteux de ma propre personne.

Je suis faible face aux jolis hommes charismatiques et enjôleurs qui savent user de leurs charmes. Surtout ceux dont la chevelure possède ce grain de vert et dont leur regard ne laisse présager que de bons moments. Facile et naïf? Je le suis peut-être encore finalement…surtout face à mon type idéal…

Le rose toujours visible sur mon visage, je ne peux pas m’empêcher de bien ressentir sa main chaude contre la peau de mon poignet. Ça ne dure que quelques secondes, mais même après qu’il m’eut lâché, j’ai cette sensation qui picote ma peau et me fait frissonner.

Je n’ai pas prononcé le moindre mot, mais j’avais acquiescé à sa proposition, hypnotisé par son élégance, sa prestance et le désir de partager encore pour quelques instants un peu de temps avec Pyrus. Juste assez de temps pour rêvasser et me rentrer dans la tête qu’une personne telle que lui ne pouvait pas jouer dans la même ligue que moi.

Installé à ses côtés au comptoir du bar, je déposai mes effets personnels en face de moi et je laissai Thiri, ma Rozbouton, faire son petit repérage quotidien à chaque nouveau lieu que je visitais. Je me mis à jouer avec les manches de mon manteau, gêné d’être assis à côté d’un tel apollon. Un dieu humain aurait tout à lui envier. Pyrus était une force de la nature autant socialement que physiquement. Il avait été bien gâté à la naissance.

- … Je bois, oui. Je ne suis pas difficile sur le choix de l’alcool…surtout si c’est bu en bonne compagnie…

Je pose un œil violacé sur l’homme à la peau basanée. J’espère que mes mots sont assez clairs pour qu’il comprenne que j’apprécie sa compagnie. Je n’ai pas l’habitude d’être très loquasse et je suis assez timide sur les nouvelles rencontres, mais je ne veux pas me prendre la tête. Si c’est une simple rêverie, au moins, j’aurai passé un bon moment.

Les breuvages arrivent et je prends mon verre en le levant pour trinquer. Je trinque à notre rencontre et à cette relation client/vendeur que nous venons de développer. Jamais je n’oserais imaginer quoique ce soit d’autres…enfin…si…mais non…

Je prend alors une bonne gorgée de mon verre d’alcool, peu importe ce qui se trouve dedans et je me détourne pour regarder en face de moi. Je dois avoir l’air terriblement étrange et un peu bizarre, mais c’est l’embarras et la timidité qui me tiennent au cou. L’alcool fera bien son petit chemin pour amoindrir tout cela et me rendre beaucoup plus…à l’aise. Tout du moins, je le crois et cela ne serait pas une première pour moi.

Je commence à me sentir un peu plus à l’aise alors que j’absorbe l’atmosphère du Barbi-chat petit à petit. Cela ne fait pas très longtemps que nous y sommes, mais c’est tout de même accueillant et chaleureux. La présence de Pyrus à mes côtés y est aussi pour quelque chose tout comme l’alcool qui enivre mes veines et mon sang à chacune des gorgées que je prends dans mon verre.

La soirée est encore jeune et c’est tant mieux. Je ne sais pas combien de temps l’herboriste prévoit de passer avec moi, toute la soirée ou bien toute la nuit, mais je ne veux pas en manquer un seul instant. Je sais que c’est impossible de l’avoir réellement rien que pour moi. Que c’est une pensée toute bête et stupide qui me trotte dans la tête, mais je m’imagine un bref espoir que ce soit le cas pour aujourd’hui. Je sais qu’à le voir, il doit être très populaire et moi, je fais pâle figure à ses côtés.

Dès que le bar se remplirait, il y aurait plein de gens pour lui tourner autour et de bien plus jolies et charismatiques personnes que moi. Je profitais donc de l’instant présent et posai un œil améthyste sur l’homme lorsqu’il prononça mon prénom. Je devais avouer qu’un frisson avait parcouru tout mon dos lorsqu’il l’avait prononcé de sa voix de velours si envoûtante. Je pourrais l’écouter des heures sans m’en lasser.

Je souris doucement alors que l’Uchinien cherchait à me faire la conversation et à en apprendre un peu plus sur moi. Son compliment sur mon visage me fit légèrement rougir et je détournai les yeux en riant un peu de gêne. Depuis Terry, je n’étais plus trop habitué que l’on complimente mon apparence. Rien de plus normal puisque je n’y avais pas trop fait attention jusqu’à tout récemment.

- Je ne suis effectivement pas Uchinien.

Je prends une énième gorgée de mon verre jusqu’à le vider de tout son contenu. Je le dépose contre le comptoir et pose mes deux orbes violacés sur l’homme assis juste à côté de moi. Il cherche à deviner ma provenance et je le laisse faire sa petite hypothèse avant de rire un peu.

- Je suis bien Agapéen, mais j’ai passé de longues années à Bedwyr avant de revenir à mon district natal. Rien ne vaut la fraîcheur et l’authenticité de mon lieu de naissance. Je préfère nettement mieux le naturel d’Uchinâ à l’artificiel de Bedwyr.

Je souris un peu plus sans le lâcher des yeux.

- Je pourrais même trouver goût à Uchinâ et aux joyaux qui la sertissent.

Évidemment, là je parlais ouvertement de Pyrus sans exactement avouer ouvertement que je parlais de lui. C’était un peu comme un compliment camouflé dans un peu de drague ou bien l’inverse. Je déliais ma langue et laissai le rose me monter aux joues une nouvelle fois face à mon audace.

Pyrus était émeraude, or et cuivre. Des métaux scintillants et une gemme éclatante de vie. Je ne pouvais plus éloigner mon regard de son physique ni mon esprit de ces mots, de cette conversation banale qui en fait ne demandait que plus encore de ma part.

- Je crois que je vais prendre un autre verre…et cette fois, c’est à mon tour de t’en offrir un. Enfin…si cela te convient. Pyrus. Je ne sais pas si tu tiens l’alcool ou possède une limite.

Autant prendre mes précautions et lui proposer sans le forcer à consommer davantage. Nous n’étions pas là pour nous rendre à l’ivresse n’est-ce pas? Ce serait bien dommage de ne plus pouvoir aligner le moindre mot à en tomber ivre mort.

J’acquiesce aux propos de Pyrus concernant Bedwyr. Je n’ai pas l’intention de retourner y vivre ou y travailler quand bien même certains de mes anciens collègues de travail me manquent. Je préfère mon district natal et la chaleur de Kalahari qui n’a rien à voir avec la froideur de Bedwyr et de sa population. Je peux très bien survivre et même vivre loin de cet endroit dur et qui empêche les gens de penser à leur façon.

- Je te le confirme. L’endroit n’a rien de convivial, rien de chaleureux. C’est sobre, impersonnel et très autoritaire…Rien à voir avec ici ou Agapé.

Je souris légèrement et me décide à retirer mon manteau et mon foulard parce qu’il commence à faire réellement chaud. Sous tout cet attirail, je porte une chemise bourgogne légèrement trop grande pour moi ce qui fait qu’elle ne me colle pas à la peau. Les deux premiers boutons ne son pas attachés au niveau du col, révélant la peau de mon cou et de ma gorge élancée.

Je dépose le tout sur le tabouret vide près de moi et je reporte ensuite mon attention sur le bel apollon qui ne cesse de m’ensorceler de ses beaux grands yeux hétérochromes. Chaque fois que je plonge mes orbes violacés dans ces joyaux vairons, je m’y perds de plus en plus. Je ne peux pas le nier, je suis sous son charme et à voir son sourire félin, il le sait très bien.

Mes joues rosées ne démentent pas non plus. L’herboriste joue avec moi et je m’en rends compte assez rapidement. Pourtant, je ne le dissuade pas d’arrêter. Je me mets à jouer aussi, ce qui n’est pas dans mes habitudes. J’ai pris un peu plus de confiance en moi avec la boisson et le deuxième verre arrive juste à temps.

- La vue me plait beaucoup. Il n’y a pas à dire, Uchinâ est un district splendide à regarder.

Nous ne nous lâchons plus des yeux. Impossible. Son sourire ravageur m’hypnotise, me garde hors de portée du monde extérieur à sa personne. Sa main contre la mienne, ses doigts effleurant les miens, tout cela me fait frémir et remonter quelques bouffées de chaleur. Je laisse échapper un léger rire à la fois un peu gêné et un peu charmé.

- Et bien…dépasser les limites c’est…s’octroyer la possibilité de conséquences positives et négatives…Tout dépend du point de vue…

Je prends une gorgée de mon nouveau verre sans le quitter une seule seconde du regard. Pyrus n'a d’yeux que pour moi pour le moment et je refuse que cela s’arrête maintenant. C’est ma chance! Ma chance de peut-être réussir à charmer un homme aussi beau que lui et à m’émanciper de mes craintes et de mes problèmes. Je pouvais profiter pour une fois, non? Meteor serait certainement fier de moi s’il savait que je me trouvais dans un bar en bonne compagnie.

J’allais peut-être lui raconter plus tard…oui…peut-être.

- Je n’arrive pas à savoir si j’ai chaud à cause de l’alcool où à cause de ton regard de braise braqué sur moi…pas que cela me déplaise au contraire…

Petite tentative de drague de ma part. Aucune idée si cela sonnait grotesque ou recherché, mais je tentais le tout pour le tout pour que l’Uchinien comprenne qu’il me faisait de l’effet et que son charme ne me laissait pas indifférent. Au cas où il ne s’en doutait pas encore, bien que cela j’en doutais fortement moi-même. Il fallait être aveugle pour ne pas voir l’effet qu’il faisait sur moi.