Fleur ne sait pas trop pourquoi elle a accepté, pourquoi elle se retrouve, là, à gâcher un jour de congé pour un rendez-vous ; la romance, ça n’a jamais été trop son truc. Après tout, son premier mariage ne s’était pas spécialement bien fini. Elle apprécie son quotidien ; sa petite vie tranquille, parfois dérangée par sa fille. Est-ce qu’elle a vraiment besoin de quelqu’un de plus, dans tout ça ?
Les sentiments des autres, elle ne les connaît pas bien ; elle a appris à décoder les codes, les interpréter et les tourner à son avantage ; pour ce qui était d’y répondre vraiment, de témoigner son affection et d’exprimer ce qu’elle ressent … elle n’est pas bonne, et elle le sais. Son impression de différence s’accentue ; la plupart du temps, elle s’y complaît. Là, elle se sent perdue. Et elle n’aime pas ça.

Mais pourtant, elle a envie d’essayer, même si avec une collègue, ce n’est clairement pas une bonne idée. Le goût du risque ?  Peut-être. La curiosité ? Sans aucun doute.

Et sans surprise, elle arrive un peu en retard au café. Sa tenue, elle n’a pas vraiment réussi à la choisir, parce qu’elle n’a pas conscience de ce qu’elle doit mettre, dans ce genre de situation ; et bien décidée à ne pas se prendre la tête, elle s’est contentée d’une chemise un peu grande, d’un pull sans manches et d’un pantalon simple. Toujours mieux que son sweat habituel de jour de congé. Puis, sa chevelure, toujours aussi désordonnée. Rien de nouveau sous le soleil.

Son holomontre vibre – elle regarde les messages, relève les yeux, et tombe nez-à-nez avec Valérie. En toute honnêteté, elle ne peut s’empêcher de la détailler, même si ce n’est que quelques secondes, avant d’aller à sa rencontre.

« Bonjour, Valérie. » Le lieutenant peine à quitter son ton cordial et plein de faux-semblants, car il a l’impression de simplement parler avec une collègue. « Allons-nous installer. »
Et surtout, il est en terre inconnue ; son ex avait fait tous les premiers pas. Lui, il est plutôt du genre à suivre. Pas comme sur les autres plans de sa vie, en fait.

Fleur lit aisément les signaux de Valérie ; après tout, depuis l’enfance, elle n’a eu que d’autre choix que d’apprendre à comprendre les autres. Son regard fuyant, ses joues rougissantes … le lieutenant est bel et bien en terre (quasi) inconnue. En espérant que Valérie est aussi entreprenante que son ex-femme, sinon leur relation ne risque pas vraiment de se débloquer.

Fleur a toujours préféré se laisser porter par le courant ; l’amour n’a jamais été explosif, chez elle. Mais plutôt comme une sensation de confort, de paix auprès d’une personne. Chose qu’elle n’a ressentie qu’une fois – et elle ne court pas forcément après non plus. C’est dur, de préférer une vie à deux à une vie tranquille, seule. Mais la curiosité n’a jamais tuée personne, non ? (Bon, peut-être si, quelque fois) Ses pensées un peu lugubres lui disent que ce serait peut-être mieux, pour qu’Emily ne soit pas seule le jour de son enterrement.

Ses lèvres se muent en un petit sourire, discret, et visiblement pas trop sarcastique ; « Sent toi flattée, c’est mon seul jour de repos de la semaine. » Et Arceus seul saît à quelle point elle aime son lit.

Maintenant, elle laisse un bras trainer sur la table, l’autre soutenant son visage. Elle ne sait jamais vraiment comment s’occuper, lors de ce genre de situation sociale, et sortir un livre ou un carnet serait probablement malvenu.
Puis, Valerie met directement les pieds dans le plat. Fleur cligne des yeux.

« Je me doute bien ; si ce n’était qu’une question de physique, je ne suis pas forcément le candidat idéal. » Le lieutenant sait qu’il n’est pas un canon de beauté ; son visage toujours fatigué, constellé de tâches brunes, ses longs cheveux emmêlés … mais il s’en moque pas mal. Son apparence, il s’en fout clairement ; mais ça n’empêche pas ses joues de subtilement se colorer. Même si sa voix reste toujours aussi monotone.
Il ne sait pas trop quoi dire – s’il doit la complimenter en retour. Il n’aime pas, ne pas savoir. Et les situations sociales, ce ne sont définitivement pas sa tasse de thé.

Puis, encore une fois, sa collègue reprend la parole, laissant lieutenant muet quelque instant. Qu’est-ce qu’elle veut ? Elle n’en a aucune foutue idée. Alors, elle prend du temps pour réfléchir ; mais la réponse reste la même.
« Je sais pas vraiment. Est-ce que c’est vraiment une mauvaise chose ?» Son ton est un peu joueur – un tout petit peu. Après quelques instants, elle reprend la parole.

« Je dois dire que je suis un peu surprise, sans que ce ne soit forcément une mauvaise chose. Mais … je suis pas spécialement fermée. Enfin, j’avoue que je ne suis pas très expérimentée, en relation. Mon mariage ne s’est pas fini de la meilleure des façons. » Elle se confie presque, à presque l’air … plus fébrile, fragile. En tout cas, ce n’est pas tous les jours qu’elle parle de ce genre de chose.

Un maigre sourire étire ses lèvres – Fleur a peur que ce qu’elle dit ne satisfais pas Valerie, mais finalement, ça a l’air d’aller. Néanmoins, ce sentiment d’inéquation refait un peu surface. Elle ne ressent ça que rarement, désormais ; mais dans ce genre de contexte, c’est toujours la même chose. Fleur a l’impression de ne pas fonctionner normalement, de ne pas ressentir les choses comme les autres, de ne pas savoir comment il doit faire, ce qu’il doit faire. Cette distance avec les autres est souvent agréable, mais lors de ce genre de moment, la barrière se fait ressentir, l’empêche de réussir à comprendre les autres. Ça a toujours été le cas, si bien qu’il a appris à classer, identifier les émotions des autres … mais son empathie laisse toujours autant à désirer ;

Tenter les choses, oui, pourquoi pas ? Mais ça l’ennuierait de décevoir Valerie – même s’ils ne se connaissent pas très bien, finalement. Et ce serait malhonnête de dire que Fleur avait envisagé quelque chose avec elle, l’avait vu comme une partenaire potentielle, bien avant son fameux SMS. En fait, elle est même surprise de se retrouver là, car ça ne lui ressemble pas, et elle n’aurait même pas imaginer que Valerie pourrait la voir de cette façon. Bref. Pendant de longues secondes, le lieutenant est abordé dans ses pensées ; ses yeux rougeoyants sont perdus dans le vide, jusqu’à la voix de la femme l’en sorte.

Elle cligne des yeux, repose son regard dans celui d’améthyste. Puis, hausse les épaules. « Juste un divorce. Ce n’est pas spécialement sensible, ni même rare ; après tout, c’est l’issue de 45% des mariages. Nous avons juste été du mauvais côté de la moyenne. »
Encore une fois, elle s’exprime à l’aide de statistiques, de discours scientifiques et objectifs ; Et après avoir fermée la bouche, elle baisse les yeux. Est-ce que c’est vraiment le genre de réponse auxquelles Valérie s’attend ? Elle n’arrive pas à le savoir, elle est perdue, et ce n’est pas avec toutes les stats qu’elle a en tête qu’elle va vraiment comprendre la situation.

…Et il s’inquiète pour rien. Il ne se sait pas si… anxieux, plein d’appréhension. C’est aussi désagréable que nouveau.
Alors, il hoche la tête. « Je n’en demande pas plus. » Un discret sourire étire ses lèvres, et lorsque le serveur fait son apparition, il demande simplement un café noir.
Le serveur part, et ils se retrouvent de nouveau face à face. Seuls.
Et Fleur ne sait toujours pas ce qu’il est censé faire ; un soupir franchit ses lèvres.

« … Désolé. Je ne suis pas très bon pour faire la conversation, dans ce genre de situation. Mon ex prenait tellement … tout en charge. » Etrange façon de la décrire, mais c’est bel et bien ce qui la représente le plus ; elle qui draguait Fleur, lui a fait une demande en mariage, et lui a parlé d’un projet d’adoptions. En bref, contrairement à sa vie professionnelle, Fleur se laisser beaucoup embarqué par l’autre personne, dans une relation.

Fleur veux se laisser porter par le courant, par la jeune femme en face d’elle. Elle a toujours fait comme ça, alors … pourquoi changer ? La romance n’a jamais été importante à ses yeux. Elle est toujours arrivée de nulle part, comme un cheveu sur la soupe. Elle ne sais pas encore ce qu’elle veut. Elle ne sait pas encore où elle veut aller, jusqu’à où. Est-ce que si mal ? Aucune idée, mais se sentir si perdu, c’est loin d’être agréable.
Le lieutenant tente de vider un peu son esprit, de ne pas laisser la machine trop en marche. Pour ce qui est des sentiments, ça ne sert à rien de trop réfléchir, non ? Il manque vraiment d’expérience à ce niveau, et c’est bien ça qui le différencie de la plupart des gens. Il se souviens à l’académie, lorsque son ami d’enfance courait déjà après les relations, alors qu’elle ne s’intéressait qu’à la bibliothèque universitaire. Encore plus loin, dans son enfance, où elle passait plus de temps en compagnie de livre que d’autre enfant. Quand on la moquer pour son manque visible d’émotions. Maintenant, elle s’en moque.
En tout cas, c’est ce qu’elle pense ; car parfois, l’impression de passer à côté de quelque chose est bel et bien présente. Mais est-ce qu’elle a envie de recommencer ? Sa relation précédente était agréable, le temps que ça a durer … jusqu’à ce que les problèmes pointent le bout de leur nez, et que tout retombe en poussière. Est-ce qu’elle a encore envie d’investir dans une relation pour qu’elle se désagrège d’elle-même ? Et…

Son regard s’est perdu dans son café noir. Elle cligne des yeux, pour revenir à la réalité – la voix de Valérie l’a sortie de toute ses élucubrations. La machine s’est bien vite remise en route. Un maigre sourire étire ses lèvres, et elle hoche la tête. Evidemment, que ce n’est pas facile.

« Hmm… » Parler de ses passe-temps ? Encore une fois, la question le prend presque au dépourvu, si bien qu’il en vient à détailler le décor autour d’eux, son regard rubis quittant bien vite celui de son interlocutrice. Il n’a pas l’habitude … et il tente d’étouffer cette impression d’être dans un groupe de parole un peu gênant. « Bonjour, Fleur ! » S’imagine t-il, faisant apparaître dans sa tête une table en cercle et des visages flou, façon alcoolique anonyme.
Et oui, il ne relève même pas la drague de la jeune femme. Bonne chance, Valérie.

« Non, je vais commencer. »  Est-ce que mentionner sa passion pour son lit est vraiment une bonne idée ? Bof. « Je lit beaucoup. Je suppose. Et je dors. J’entraine mon équipe quand j’en ai l’occasion. Rien de très passionnant, le travail me prend beaucoup de temps. Et Emily, aussi. » Au moins, Valérie est au courant, pour sa famille ; elle n’a pas envie de la cacher.
Puis, elle hausse les épaules, mais elle omet son autre activité principale. Est-ce qu’elle est un peu … pudique ?  Oui, peut-être, après tout, elle n’en parle pas souvent. « Et j’écris, aussi. Ca fait un petit revenu supplémentaire, même si je n’en ai pas vraiment besoin. »

Petit moment de blanc, avant qu’il ne reprenne la parole. « Et toi ? Je suppose que les gens renvoient la question, en général. » Un petit sourire mesquin étire ses lèvres. Ses yeux se relèvent, détaille les cheveux aux teintes safran, les yeux lavande. Il aurait pu oser un peu plus ; lui demander pourquoi lui, pourquoi maintenant, juste, pourquoi ? Mais bon.
Il a visiblement la flemme de faire des efforts. …A moins que ?

« En fait, j’aimerai savoir… Pourquoi moi ? » Son regard se plante dans le sien. Sa carapace froide reprend un peu de place, mais est tout de même moins épaisse qu’avant. Ses joues prennent quelques teintes, subtilement. « Pour ce qui est d’initier une relation romantique, je pense qu’il y a bien meilleur candidat au sein de l’organisation. » Encore son foutu esprit analytique … elle ne peux pas s’en empêcher.

Fleur n’a pas l’habitude de parler de ses passions, hors du travail – en fait, elle n’a pas l’habitude de parler hors du travail tout court. Dévoiler sa part d’ombre ça a quelque chose de … nouveau. Mais pas foncièrement désagréable. De toute façon, c’est un peu trop tard pour reculer, maintenant. Elle souhaite juste rester sous pseudonyme – toute sa carrière, de préférence. « Ce n’est pas si impressionnant que ça. Ce n’est pas comme si je pouvais en vivre. »

Les genres, ensuite … elle ne se voit pas vraiment écrire de la Poésie. Ou de la romance. Ou de la fantasy. Son esprit n’est pas très attaché aux thèmes des sentiments ou des mondes imaginaires, éloignés de la réalité. « Plutôt le thriller. Et le policier. » Non, les crimes, les ombres du cœur des hommes, c’est déjà bien plus intéressant. Et tangible.

Viens ensuite les passe-temps de Valérie. Ouf. Fleur ne voit pas parler pendant des heures. Et la femme en face d’elle semble presque gêner. Même si le lieutenant ne porte pas forcément le médium des jeux-vidéos dans son cœur, il ne dit rien de désobligeant. En bref, il s’en moque pas mal. « C’est un passe-temps comme un autre. Tout comme l’espace. C’est intéressant d’en détailler la structure, le fonctionnement. Finalement, de nos molécules, jusque dans les étoiles et les galaxies lointaines, tout est fait de mathématiques et d’organisation stricte, précises. » Il marque un blanc – peut-être qu’il est allé trop loin. « … En tout cas, je trouve ça intéressant. » Il se sent trop facilement se perdre dans ses pensées, ses connaissances, la bibliothèque d’Alexandrie habitant sa boîte crânienne. C’est toujours pareil – pourtant, il veut se concentrer sur la discussion, mais parfois, son esprit est bien trop volatile.

Enfin, là, un peu moins. Parce qu’enfin, il va avoir des réponses ; Il est peut-être un bon choix pour ce qui est de la réputation, et de sa place dans l’organisation, mais pour le reste … Il sait qu’il n’est pas un bon partenaire, pas une bonne moitié. Trop renfermé sur soi-même, trop distant, pas assez attentif. Tout ses défauts, il les connaît, il les accepte mais ne souhaite pas pour autant les imposer aux autres pour une relation amoureuse. Il se souviens encore de ses vœux, échangés devant un hôtel. De son costume aux teintes d’onyx et de rubis, que sa mère avait tant aimée ajustée et observée. De son père, droit, fier et imposant, qui ne serait plus jamais aussi resplendissant, plus jamais en bonne santé…
Son regard s’assombris, quelques instants, avant qu’une fois de plus, la voix de Valérie ne la ramène à la réalité. La mort, qu’elle soit bonne ou mauvaise, a toujours une place omniprésente dans son esprit, depuis son enfance. Mais parfois, il faut bien l’oublier, et vivre sans se soucier du lendemain, sans se soucier de son géniteur qui traverse sans doute ses derniers mois.

Jolie. Elle n’a pas l’habitude qu’on s’attarde sur son apparence, en même temps, elle n’en a jamais pris soin. Néanmoins, dans le fond, ça lui fait quand même quelque chose ; ça ne la laisse pas totalement insensible. Son intelligence, elle la connaît. Sa curiosité aussi. Sa beauté, un peu moins.
Le reste le pris au dépourvu. C’était ce genre de choses que Sarah avait appréciés (a priori). Sa façon d’être, sa froideur, son manque de connaissances de l’étiquette sociale. Et ça la touche. Parce qu’elle se rappelle de son ancienne relation, de toute les belles choses qui les reliaient. Evidemment, elle ne regrette pas ; Mais ses joues s’empourprent légèrement.
« Ah. Au moins, je suis sûr que ce n’était pas par pitié, maintenant.» Du sarcasme, montrant presque qu’il est gêné, qu’il ne sait pas quoi répondre, incapable de croiser les iris lavandes de la jeune femme. Il garde la tête un peu basse, sa main se glissant sur la surface froide de la table. Une invitation à un contact physique ? Peut-être – ou peut-être pas. En termes de relation, Fleur n’est même pas sûr de savoir ce qu’il veut.

C’est presque une déclaration d’amour, et le lieutenant ne sais pas où se placer. Son lit aurait moins fait des montagnes russes avec son cœur, mais c’est un peu tard, maintenant.
« Non. C’est pas grave. » Son ton est neutre, comme toujours, mais pas aussi froid, pas aussi tranchant. Son regard se relève vers le sien. Désormais un peu plus calmé, Fleur arrive à un peu plus à formaliser ses émotions. Ce qu’il veut, pourquoi il est là. Autant être honnête dès le début, non ?

« Tu n’as pas besoin d’en dire plus. C’est juste que …j’ai besoin de temps. Je ne m’attendais pas à ça. Tout ça, c’est une surprise. Je ne peux pas décider sur un coup de tête de … me lier à quelqu’un. J’ai besoin de temps. De voir comment ça marche. Si ça marche. » Il se sent trop dur, trop brutal. « Je veux juste être honnête avec toi. Tu es … une jeune femme de talent, mais je ne sais pas encore. Je n’avais même pas prévu de me remettre en couple. Passer ma vie célibataire, ça m’allais tout aussi bien. »
Sa main se pose doucement sur la sienne. Ses yeux ne quittent pas les siens. Elle veut bien que Valérie comprenne que Fleur est ouvert ; mais que la romance n’a aucune importance, à ses yeux. Que tout ça est une surprise, une opportunité auquel il n’avait pas pensé.  

Valérie semble comprendre, ne serait-ce un minimum, la façon de fonctionner de Fleur. C’est un peu rassurant – parce que le lieutenant à l’impression de marcher sur un terrain miné. Jonglant avec son intérêt pour la jeune femme, et l’envie de ne pas s’investir trop vite, de ne pas s’enchainer à une relation. La romance a encore un léger goût d’inconnu ; après tout, une multitude de relations sont possibles. Son alchimie avec son ex serait sans doute différence de celle, potentielle, avec Valérie.

Et Fleur a envie de songer un peu à tout ça ; de laisser son esprit divaguer, imaginer des futurs alternatifs avec la jeune femme. Peut-être que ce ne serait pas si mal. Mais pour le moment, elle ne sait pas encore.
Hochement de tête de la part du lieutenant. « Je suis content que ce soit clair. » Pourquoi pas, après tout ? Pourquoi pas tenter sa chance, au moins essayer ? Peut-être que la vie à deux, c’est finalement mieux que celle seule. Même si ça ne la dérange pas, sa curiosité est presque trop forte. La passion de la chair, de l’explosion de sentiment ne l’a jamais trop attirée. Sa première relation, presque subie, presque forcée – même si elle était consentante, évidemment. Mais est-ce que ne serait pas quelque chose de nouveau, de tenter l’expérience de nouveau, en prenant les rênes ?

Un maigre sourire naît sur ses lèvres, bien plus expressif qu’on ne pourrait le penser au premier abord. Après tout, Fleur n’a jamais été dans les expressions franches, reconnaissables et pleine d’énergie. Sa façon de montrer ses sentiments à toujours était discrète, subtile – quand elle est honnête, en tout cas. « Si ça ne me plaît pas, ne t’inquiètes pas, je te le dirais. » Il ne faut pas non plus la prendre pour une petite chose fragile, ce serait plus embarrassant qu’autre chose.  
Sa main lui arrache quelques frissons. Une petite étincelle. Tout cela est bien plus intéressant que prévu.
« Non. » Sa réponse est peut-être un peu trop rapide. « Je veux dire, tu peux rester, si tu veux. De toute façon, il n’y a que mon lit qui m’attend… Pour une sieste, j’entends. » Les sous-entendus graveleux, ce n’est pas vraiment sont truc. Elle préfère clairement laisser ça à Meteor.
Mais la conversation s’étiole, et déjà, le lieutenant ne sait plus trop de quoi parler. Sa main, pourtant, ne quitte pas la sienne.

Le visage de la jeune femme se mue, change de couleur, passe au rouge. Fleur a dû mal à savoir se positionner, la raison de sa réaction, tout est difficile, nouveau et dur à comprendre. C’est un peu excitant, mais ce manque de contrôle l’effraie aussi un peu.

Quand bien même, comme prévu, la conversation se poursuit, alors que Fleur frémit, sous les mouvements de la peau, contre la sienne. Des mouvements minimes, des petites caresses, mais pourtant, c’est déjà beaucoup pour quelqu’un qui vit en misanthrope, qui se trouve toujours à l’écart, hors des relations sociales, hors des plaisirs de la chair.

« Euh. Oui. » Le lieutenant a pris quelques secondes à répondre, parce que son esprit peine à rester fixer sur la conversation. Ses pensées dévient, se perdent en chemin, se transforme avant qu’elles ne soient élaborées. « Enfin. Je n’en écoute pas tant que ça. Un peu de musique classique. Ce qui passe à la radio. » Il hausse les épaules. Ce n’est pas son moyen d’expression, son art préféré, si bien qu’elle se sent un peu mal de lui apportée une réponse aussi pauvre.

La malice éclaire son visage ; et ce n’est pas désagréable. Parmi toute cette nouveauté, il y a une impression comme si … elle retrouve un reste de son ancienne relation. Peut-être qu’elle a belle et bien un type. « Le restaurant, je suis déjà un peu plus à la page … Il y en a de très bon, à Agapé. Enfin, ça peut dépendre de ton régime alimentaire, mais moi, je mange de tout. Peut-être qu’on pourrait y aller, un jour. » Est-ce … une proposition ? Fleur ne s’en rend compte qu’après avoir fini sa phrase, ce qui le gêne un peu.

Il refroidit un peu, en parlant de Pokémon. Les discussions sur le bien-être de ces bestioles, sur la nécessité de plus les inclure, ça ne l’intéresse pas du tout. « Ils me sont utiles. J’aimerai bien les entraîner un peu plus, pour avoir de quoi me défendre. Je ne m’y attache pas particulièrement, et je n’ai pas envie de m’y attacher non plus. Je pense tout de même être triste, si on me sépare de mon Spiritomb. Mais c’est plus ou moins tout. Puis … la montée de cette volonté puérile de vivre avec eux m’inquiètent un peu. Je sais ce qu’ils sont capables de faire – et c’est pour ça que je n’aime pas trop voir les civils se promener avec. »
Et si ça ne plaît pas à Valérie, eh bien … tant pis. Fleur ne souhaite pas se lancer dans une relation pour qu’elle soit encore détruite par des divergences d’opinion. Son ex adhère aux idées des Victinis – pas elle. Fin de l’histoire. Et c’est très bien comme ça.

Ses gouts musicaux – très peu intéressants – ne semble pas intéresser tant que ça Valerie. Par contre, Fleur est curieux d’avoir son avis, sur les Pokémons : autant ne plus se lancer dans des relations vouées à l’échec, par tentées de lier deux âmes aux fondements bien trop différents.

Petit hochement de tête de son côté aussi. « Je suis content qu’on soit d’accord. Beaucoup de gens on des points de vue … critiquable. Même dans l’Organisation. Autant ne pas débattre sur ça, vu que nous sommes d’accord. » D’accord de la stupidité que c’est de laisser des dresseurs se promener avec des Léviator, Golem ou autre Gallame. D’accord sur le manque de sécurité de la population, sacrifiant sa paix contre la présence de quelques Pokémons qui pourraient très bien tout détruire sur son passage.

Fleur se perd un peu dans ses pensées, prend un peu de temps pour réagir lorsque Valerie reprend la parole. « Non, ne t’inquiètes pas. » Elle ne réagit pas à sa joie – parce qu’elle ne sais toujours pas comment le faire, toujours pas montrer clairement ses émotions.

Néanmoins, l’ambiance est vite détruite par la sonnerie de l’Holomontre de la jeune femme. Tant pis. Fleur retire discrètement sa main de la table, comprenant bien que le moment est fini ; néanmoins, cette absence de chaleur lui fait ressentir un certain manque. Elle qui croyait pouvoir vivre sans contact physique, reclus dans sa grotte, aka son lit. Être dans une situation inhabituelle lui permet peut-être d’en apprendre un peu plus sur elle-même.

« Je comprends. Ne t’inquiètes pas. » Voix neutre, encore une fois, mais le lieutenant n’a pas envie de feindre des émotions. Puis, ils sont dans le même bateau … l’organisation empiète souvent sur sa vie privée, ce n’est pas nouveau. « On pourra toujours remettre ça. » Fleur se lève doucement, regroupe ses affaires. Avant de se stopper, de lui lancer un regard. « Enfin, si tu veux. »
Elle ne sait pas vraiment si ça lui plait – a priori, oui ? Mais comment en être sûre ? Enfin, elle reste évidemment ouverte à … une suite potentielle.
Pourquoi pas, après tout. Peut-être qu’être avec quelqu’un de l’Organisation lui permettrait de nouer une relation sans se détruire mutuellement.