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Une nouvelle journée qui commençait en tant que professeur à la grande et prestigieuse académie Uxie. Pas que cela soit si impressionnant pour moi, désormais. Certes, j’y avais fais mes études et y avait passer des moments assez…corrects, mais sans plus. Un établissement scolaire n’était qu’un établissement scolaire. Une éducation structurée et pertinente ainsi qu’une discipline de fer, voilà l’idéal d’une bonne école. Mes classes étaient construites sur le même genre de modèle et j’en étais pas peu fier. Zéro technologie, zéro tricherie, tout allait pour le meilleur des mondes. Enfin…si on oubliait les cancres et les idiots. Eux…ils ne valaient pas grand-chose niveau cervelle et intellect. Du rattrapage les guettait fortement à l’horizon.

Ma serviette en cuir à la main ainsi que Pinku sur la tête, j’avançai d’un pas assuré et droit vers la cour extérieure pour pouvoir attendre l’entrée la plus près de ma salle de cours. Mon regard sévère se promenait d’un étudiant à l’autre, m’assurant qu’ils ne commettaient aucune bêtise. Je n’étais pas de la police, cela allait de soi, mais j’étais du corps professoral. J’avais comme tâche de faire régner la discipline et le suivi du règlement au sein de l’académie. Si je percevais la moindre infraction, c’était une retenue assurée! Sévère? Évidemment. Abus de pouvoir? Quand même pas. Je ne renvoyais pas les élèves, je les éduquais et leur donnait des leçons.

Mes orbes de cuivre finirent par se poser sur une tête rose assise sur un banc. Sa physionomie me rappela vaguement une personne de ma connaissance. Seule différence entre cette loque et elle, le petit pétillement de vie qu’il lui manquait. Je m’approchai, ralentissant le pas alors que Pinku s’envola pour aller se poser sur le banc à côté de l’individu. Je plissai le regard et me planta devant lui, finissant par reconnaître Niko, sous la fatigue et les cernes. Je claquai de la langue, agacée en voyant la cigarette entre ses doigts. Je finis par lui jeter un regard des plus sévères et des plus sérieux.

- Je n’ai jamais vu une loque aussi peu attractive que toi. Tu fais peur aux élèves et tu empestes la boisson énergisante et la cigarette. Tu me fais pitié. Nikolaï. Sérieusement, tu ne ressembles à rien. On dirait un clochard avec une tenue d’occasion.

Pinku s’ébroua à côté de l’homme à la chevelure bubblegum alors que moi, insensible, je lui disais le fond de ma pensée. J’avais une très forte envie de lui arracher son poison des doigts, mais je ne le fis pas. Déjà que les étudiants encore à l’extérieur posaient leur regard sur nous, autant ne pas faire plus de scène et gérer cela comme des adultes. Enfin…si Nikolaï avait encore la capacité neuronale de fonctionner et de répondre. J’en doutais fortement à voir son état. Il était définitivement bon pour une pause.

- Lève-toi. On va te rendre un peu plus Grodoudou et un peu moins Miasmax.

J’observai Niko alors qu’il captait tous les mots sévères et peu doux que je jetais au visage. J’avais les sourcils froncés et j’attendais patiemment qu’il se lève pour pouvoir le toiser comme un père bien peu fier de sa progéniture. Non, ce n’était pas mon fils, mais s’il l’avait été, je lui aurais botté les fesses avec grand plaisir. Niko…tu te laisse aller et après tu mets toute la faute sur ta thèse…Tch. Vraiment…je ne le comprends pas trop, mais je compatie en quelque sorte. Les études supérieures, c’est du lourd.

Je finis par passer ma main sur mes cheveux jusqu’à la couette, fermer les yeux quelques secondes et soupirer lourdement avant de reporter mon attention sur le bubblegum en face de moi. Peut-être y étais-je allé un peu fort en effet. Soit. Je n’allais pas m’excuser pour si peu. Enfin…pas entièrement.

- Je t’ai déjà vu beaucoup plus pétillant. Cette thèse…elle te prend vraiment la tête…m’enfin…Tu es brillant. Elle sera acceptée.

Un peu d’empathie? Oui…bon…juste un tout petit peu. C’était un ami après tout. Je n’avais pas l’intention de le faire pleurer ou de le pousser au désespoir. Cela serait bien ma veine. Je n’étais pas tyrannique, même si parfois, les élèves me surnommaient le dictateur ou quelque chose du genre. Meh. Qu’ils s’amusent. Si cela n’entachait pas ma crédibilité en tant que prof, je n’en avais que faire des ouïes dires.

Pinku fini par décoller du banc pour aller sur poser sur ma tête et je l’en chassai, ne voulant pas qu’il ruine ma coiffure. J’allais donner un cours sous peu, moi! Pas question qu’il mette la pagaille dans ma chevelure de neige que j’avais mis un temps fou à attacher convenablement! La majorité des mèches étaient sous l’élastique alors, je ne voulais pas avoir l’air ridicule.

Pourtant, quand Niko me demanda ce que nous allions faire. Je songeai à mon cours qui allait bientôt débuter et ensuite à cette tête rose qui semblait prête à parcourir le monde pour oublier ce qui le tracassait. En tant que personne responsable et sérieuse que j’étais, je n’avais qu’un seul choix. Je déposai ma serviette en cuir sur le banc et grognai avant de sortir un carnet, puis un stylo à encre noire. Je griffonnai quelque chose sur le papier, l’enroula autour de la patte de mon Tylton et l’envoyai vers l’intérieur de l’académie. Je serrai le tout ensuite et relevai mes orbes cuivre vers l’autre enseignant.

- J’ai envoyé une missive à mon assistant pour qu’il sache que je serai absent pour le cours qui débute dans dix minutes. Il fera une session d’études avec les étudiants et ils auront un contrôle surprise au prochain cours. Tu es la priorité, Niko. Ton état m’inquiète sincèrement et je ne le répèterai pas.

Je repassai ma main dans la couette de ma queue de cheval et détournai ensuite le regard, un peu gêné par ma propre compassion à l’égard de Nikolaï. Il y avait un stand de smoothies non loin de l’établissement scolaire et je savais qu’il y trouverait certainement son bonheur. Cela ne me dérangeait pas d’y aller. Pour lui. Je préférais le voir sourire que de le voir à peine vivant.

- Je ferai un effort pour t’appeler simplement Niko, mais je suis sûr que tes parents n’auraient pas été très fiers de te voir dans cet état. Tu es adulte. Prends soin de toi.

Peut-être allais-je lui proposer d’aller dans un salon de beauté et de relaxation pour l’aider à se remettre de son lourd fardeau en tant que champion d’arène, chercheur en pleine thèse et professeur de biologie. Tout ça en même temps…c’était carrément du suicide mental!

- Le stand de smoothies près de l’académie existe encore. Allons-y, mon ami.

- Tu sais, Niko, les gens ici me trouvent bizarre parce que je ne suis pas totalement leur mode de vie et leur mentalité, mais je n’en ai rien à faire. En vrai, je vis comme je l’entends et c’est ce qui compte pour moi. S’ils n’aiment pas ta thèse parce que ce cela ne leur correspond pas, qu’il aille tout simplement se faire foutre.

Je dis ses mots avec neutralité, platitude même. J’avais l’habitude que les habitants de Bedwyr me dévisagent en me voyant dans la rue lorsque je ne travaillais pas. Un punk, un rebelle, un fouteur de trouble, c’était ce qu’il voyait en moi avant même de m’avoir adressé la parole juste parce que j’avais des goûts vestimentaires différents des leurs. L’habit ne faisait pas le moine, mais beaucoup de personnes ne devait plus se souvenir de cet adage. Penser différemment était-il une mauvaise chose au fond? Pas du tout. Si tout le monde pensait de la même manière, il n’y aurait jamais d’innovation, de débat et de questionnement. Ce serait tout blanc ou tout noir. La vie n’était pas ainsi.

Bien sûre, lorsque mon collègue me demanda si j’avais une montre à la pointe de la technologie, une holomontre ou quelque chose du genre, je le regardai avec mon air le plus sérieux. J’inspirai profondément et j’ouvris la bouche pour parler.

- Je ne vois pas pourquoi je gaspillerais mon argent pour un gadget technologique dispendieux et qui ne sert strictement à rien. Je déteste la technologie qui rend les gens flemmards et fainéants. De plus, Pinku fait très bien son travail et si j’ai une véritable urgence, j’ai toujours mon téléphone portable avec moi.

Dis téléphone qui remontait à au moins dix ans, mais s’il fonctionnait bien, je n’allais pas le changer pour être à la mode, hein.

- Une montre avec un accès Internet, des tonnes d’applications et même un pokédex intégré ce n’est plus une montre. C’est une horreur, une ordure ou un attrape-nigaud. En quoi est-ce gratifiant de trouver toutes les informations du monde dans un petit truc rectangle au poignet alors qu’explorer, découvrir et faire tout le travail par soi-même l’est mille fois plus? Hum? Tu peux me dire, Niko? La technologie est en train de dévorer le cerveau des jeunes générations et de les rendre stupides. Bien qu’ils ne le soient pas de base…même si pour certains…j’ai un doute, mais tout de même! Les gens ne savent plus être indépendants et autonomes! C’est simplement et complètement débile!

Vers la fin, je m’étais un peu laissé emporter. Je repris mon souffle en passant une main sur mes cheveux et détournai le regard une énième fois depuis que je me trouvais avec Nikolaï. Je regardai vers l’entrée de l’édifice pour voir si Pinku revenait. Pas encore…visiblement.

Je me raclai la gorge et finit par me tempérer en accompagnant le champion d’arène vers le stand de smoothies, éclaircissant mes pensées pour oublier mon éclat et mon opinion vis-à-vis la technologie dans ce district. J’allais me calmer avec un bon breuvage et ensuite j’irai proposai à Niko s’il voulait venir avec moi dans un salon de relaxation et de beauté. Oui. Parfait. Voilà. J’allais donc pouvoir passer à autre chose et moi-même prendre un peu de détente.

Alors que l’autre homme prenait un smoothie cerise et framboise, moi je regardais encore le menu, indécis. Mon Tylton en profita pour m’attaquer par derrière en se posant avec entrain sur le sommet de mon crâne. Je m’en cognai presque le front sur la table. Je grognai avec véhémence et je l’aurais bien fusillé du regard, mais il n’était pas dans mon champ de vision. Je pouvais toutefois l’entendre gazouiller de plaisir et je grognai de plus belle.

- Pinku…!

Je finis par me décider pour un smoothie banane et mangue et je passai ma commande.

- C’est pour moi la facture des deux smoothies. Pas besoin de faire payer mon collègue. C’est cadeau pour lui.

Je jetai un coup d’œil au professeur de biologie et je lui fis un signe de tête voulant dire, pas de problème, je gère. Ensuite, nous attendîmes nos commandes et je me remis à lui parler.

- J’ai pensé à cela et je me suis dis que nous pourrions aller dans un salon de beauté et de relaxation ensuite. Cela te fera un très grand bien et j’en profite en même temps. Tu ressortiras de là, la tête complètement vide et le corps reposé.

En parlant de téléphone, je me rendais compte que malgré tout ce temps à avoir côtoyé Niko, je n’avais jamais pensé à lui demande son numéro. En même temps, je préférais envoyer Pinku porter mes messages. Je le savais fiable et rapide dans son travail de messager. Le téléphone, c’était pour les urgences…mais en même temps…peut-être un brin pratique pour si j’avais envie de rejoindre mon collègue hors Bedwyr. J’étais un peu en dilemme avec moi-même, là. Devais-je lui demander son numéro ou non? Était-ce vraiment nécessaire ou non?

Je finis par revenir à moi lorsque Nikolaï me parla de ses examens papiers et des petites choses qu’il faisait pour faire en sorte que ses étudiants ne trichent pas et apprennent bien. Une chance! Moi qui étais vieux jeu, je faisais en sorte qu’aucun de mes étudiants ne puissent avoir accès à quelque technologie que ce soit dans mes cours. C’était bloc-notes, cahiers spirales, stylo et jugeote. Tout comme le professeur de biologie, mes cours étaient oraux et possédaient peu de support visuel, sauf si je me décidais à écrire au tableau. Les téléphones et montres intelligentes étaient enfermés dans une boîte à chaque début de cours pour empêcher les jeunes de se tourner les pouces et de ne pas écouter. J’étais très sévère et je n’acceptais pas qu’on puisse faire le pitre dans mes classes. C’était peut-être pour cela que j’étais crains et que les étudiants parlaient dans mon dos. Je m’en fichais.

Mon smoothie entre les mains, je jetai un œil à Nikolaï et secouait doucement la tête avant de lui faire un petit sourire. Pas besoin de dire quoi que ce soit ou de me remercier pour tout cela. Je voulais simplement qu’il aille mieux, qu’il se sente mieux et que pour une fois depuis un moment, il passe une belle journée. Je pris une gorgée de ma boisson et laissai la saveur de la mangue et de la banane submerger mes papilles gustatives. C’était délicieux et rafraîchissant. J’avais fait un bon choix.

- Tu as beaucoup trop de charges mentales sur le dos et dans la tête ces derniers-temps. Tu es loin d’être à ton meilleur et cela te pèses, c’est certain. Aujourd’hui, oublies tout cela et amuses-toi, Niko. C’est à mes frais.

Je pris une nouvelle gorgée de mon smoothie et je finis par le tendre vers mon collègue pour savoir s’il avait envie d’y goûter. Partager ne me dérangeait pas du tout. Il avait beau avoir l’air d’une loque, je le savais propre et possédant une bonne hygiène corporelle. Enfin, ne restait que l’odeur de la cigarette et de boisson énergisante, mais qu’importe. Elles ne seraient plus là dès que nous atteindrions le salon de beauté et de relaxation. Après, il serait frais comme un Sorbébé et aussi pimpant qu’un Leveinard.

- Alors, du nouveau outre cette thèse de l’apocalypse? J’ai entendu dire que tu avais repris l’arène de Tôkan. Tu t’en sors bien? Cela m’a l’air d’être une très grosse responsabilité.

Mes orbes cuivrés observaient le plus jeune, m’attendant à une réponse de sa part bien évidemment. Je n’en savais pas trop concernant ce boulot de champion, mais cela semblait être assez demandant aussi. Il y avait encore des gens voulant les défier et les combattre avec leur équipe pokémon. Ce n’était pas mon cas. La bagarre et la violence, ce n’était pas trop mon truc.

- Tu connais le salon de beauté Spadodo? C’est un salon type spa avec massage et tout. Je pense qu’ils ont essayé de faire un jeu de mot avec spododo, spa et relaxation. J’aimerais qu’on y aille ensemble après les smoothies. J’ai envie de l’essayer.

Oui, je voulais être certain qu’il accepte la proposition. J’avais vraiment envie d’y aller et d’en profiter.

Niko se mettait trop de pression et cela se voyait comme le nez au milieu du visage. Pourtant, il essayait de tenir bon même si ses méthodes n’étaient pas nécessairement les bonnes sur le coup. J’étais content qu’il se confie un peu à moi. J’en apprenais davantage sur mon collègue et ami, sur la personne qu’il était et la personne à devenir. J’hochai de la tête à ses propos et finit par déposer mon smoothie sur la table, voyant qu’il ne voulait visiblement pas y goûter. Tant pis. Il n’aimait peut-être pas la mangue ou la banane. Triste, mais je comprenais.

Je l’observai cependant et secouai la tête alors que mine de rien, le rose se dégradait un peu, se dévalorisait. Je ne croyais pas un traître mot de ce qu’il disait. Il était génial. Ce n’était pas vrai du tout que Nikolaï Óneiros Neos était moins spécial que les autres membres de sa famille. Je ne les connaissais pas, certes, mais je pouvais tout du moins jurer que ce n’était pas vrai. L’autre homme donnait toujours le meilleur de lui-même pour ce qui lui tenait à cœur. Cela, je le savais. C’était certainement pour cela qu’il était dans cet état aussi. À toujours trop donner. Je n’avais pas vraiment envie de voir Niko redevenir une loque. Ce n’était pas agréable à voir, ni à sentir…enfin bref…

- Tu es génial. Sûrement même trop génial pour te tenir avec un mec comme moi.

Je pris une gorgée de ma boisson fruitée, faisant taire le reste des propos que j’aurais aimé dire. Ce n’était pas le moment de lui en mettre plus sur le dos. Pas besoin de lui parler des rumeurs me concernant, même si elles n’étaient pas véridiques. C’était sa journée. Pas la mienne. J’espérais seulement que personne ne viendrait à lui tenir rigueur d’être en ma compagnie. Je ne voulais pas qu’il ait mauvaise réputation à cause de moi.

- Les combats pokémon ne sont pas trop mon truc, mais je viendrai peut-être t’encourager un jour…quand tu voudras.

Autant lui donner mon soutien pour ce qu’il entreprenait. Le Tôkanais avait besoin de se sentir supporté même s’il ne le disait pas explicitement. Ce sentiment d’infériorité, cette charge mentale…tout ce stress concernant sa thèse qu’il croyait déjà vouée à l’échec sans même l’avoir encore présenté au conseil…tout cela…ce n’était pas bon pour lui. Je voulais lui remonter le moral et retrouver mon ami d’antan. Celui qui souriait et qui riait. Celui qui faisait bon de fréquenter après les cours et qui me faisait parfois oublier d’être trop sérieux.

J’esquissai un léger sourire en me remémorant quelques souvenirs et laissai un léger rire s’échapper de mes lèvres alors que Niko se demandait s’il était en si mauvais était que cela. Oui, il l’était. Mais cela allait changer sous peu.

- Totalement. Une vraie loque.

Je terminai rapidement mon breuvage et me relevai. Pinku s’envola et se posa à mes pieds alors que je m’étirais un peu. J’avais hâte de pouvoir me relaxer au spa et de profiter un maximum de ce qu’il avait à offrir. Je finis par me rappeler quelque chose et je sortis un bout de papier, un stylo à encre noir et je griffonnai dessus avant de le tendre à mon ami à la chevelure rose bonbon.

- Mon numéro de téléphone pour…quand je viendrai t’encourager…appelle-moi. Je viendrai.

Après cela, direction le Spadodo et ses équipements derniers cris pour se refaire une beauté en toute tranquillité avec le professeur de biologie. J’avais trop hâte! Cela devait se sentir que j’étais un poil impatient d’y être. Ma peau avait besoin d’un petit rafraîchissement et mes ongles…obligé. Je n’allais pas ressortir de là avant d’avoir eu une manucure impeccable!

- Être professeur dans une académie prestigieuse ne veut pas dire que je suis irréprochable. Une pomme pourrie peut toujours se retrouver là où elle ne le devrait pas. Les gens ont tendance à cacher leurs mauvais côtés. Moi, j’essaye simplement de ne pas trop exagérer.

Je trouvais que Nikolaï voyait trop le bien en chacun de nous et en oubliait que parfois, cela n’était que subterfuge. Pour ma part, je préférais voir les gens en gris. Une parcelle de blanc et de noir à la fois. Personne n’était foncièrement gentil tout comme personne n’était foncièrement méchant. Chaque individu avait sa propre vision du bien et du mal et il en vivait comme bon lui semblait. Les lois avaient été instaurées uniquement dans la mesure de limiter le chaos et de mettre en place une ligne directrice pour tous et chacun. Pourtant, il y aurait toujours des gens pour les enfreindre et même passer sous les mailles du filet.

- Ne t’inquiète pas pour moi, je connais ma valeur.

Je dis ses mots sur un ton légèrement solennel comme si c’était une déclaration ou quoique ce soit. En vrai, je fanfaronnais un peu pour détendre l’atmosphère. J’étais adepte de sujets sérieux, mais je n’étais pas contre un peu de détente de bonne entente non plus. Nous avions tous les deux besoins de décompresser. Chacun à notre manière en vrai. Évidemment, mon ami à la chevelure rose bonbon bien plus que moi. Je profitais simplement de l’opportunité.

- Tes passions font de toi qui tu es. Il n’y a rien de honteux à aimer Giratina.

Oui, je savais pour le légendaire et cette passion dévorante qui habitait le champion. Je trouvais cela tout aussi fascinant que lui, mais du côté historique bien plus que de la bête en question. Si les pokémons avaient créé le monde, qui avait bien pu créer l’être humain? Les pokémons légendaires faisaient parti d’une certaine manière à notre patrimoine et nos origines. Il fallait simplement découvrir à quel point ils étaient impliqués. J’imaginais bien un professeur de biologie workaholique et fanatique y arriver un jour.

J’esquissai un petit sourire lorsqu’il accepta en quelque sorte ma demande à le voir combattre. Je ne m’attendais pas à ce qu’il accepte en vrai. Je le savais timide et je m’étais dit qu’il aurait peut-être pu être gêné que je veuille l’encourager lors de l’un de ses combats. Bah, tant mieux alors. Niko me fit rire un peu lorsqu’il se mit à protester et à se défendre en prônant les dimanches matin détente et vêtements mous. Je secouai la tête et me passai une main dans les cheveux, remettant une mèche rebelle derrière mon oreille.

- Je ne possède aucun vêtement qui fait de moi une loque. J’ai un look à entretenir!

Oui, mais non. J’avais aussi des vêtements mous et des joggings, des sweats et ce genre de vêtements passe-partout. Je n’en possédais pas beaucoup, qu’un ou deux, mais quand même. Si j’étais pour rester chez moi, je préférais me mettre à l’aise et c’était tout à fait normal.

- Enfin, tu as raison. Parfois cela fait du bien de ne pas faire d’efforts sur le look. Je n’ai personne à impressionner de toute façon.

En nous dirigeant vers le spa, indiquant la route à mon compagnon de fortune, celui-ci se mit à me poser des questions sur l’établissement. Je me mis à réfléchir quelques instants avant de le regarder, marchant à ses côtés.

- Il me semble qu’ils font un peut de tout. Il y a des forfaits et des combos aussi. Je compte me refaire une beauté épithéliale et une manucure des ongles. Je suis certain qu’ils pourront rendre tes cheveux aussi doux, brillants et volumineux qu’à l’habitude. Je risque d’aller faire un tour dans leur sauna aussi. J’ai entendu dire que pour les pores de la peau, c’était magique.

Faire respirer ses pores c’était important. Après, les soins apportés rendraient ma peau douce et belle comme si elle n’avait jamais vécu la dureté d’un mauvais savon ou de produits de moins bonne qualité. J’en prenais grand soin chez moi, mais parfois par manque temps, je manquais une séance matinale ici et là. La vie quoi.

Une fois devant la devanture de l’établissement, j’observai le panneau qui montrait une illustration d’un spododo qui semblait en bonne santé et le nom du spa en grosse lettres carrées. J’entrai en entrainant Nikolaï avec moi et je m’approchai du comptoir de service à la clientèle.

- Bonjour, nous venons pour la première fois ici et nous sommes intéressés par vos offres et forfaits. Qu’avez-vous de plus à offrir que vos compétiteurs?

Oui, c’était tout moi. Aucun tact et droit au but. Je savais déjà quelques différences entre les divers endroits qui offraient le même genre de soins corporels, mais je voulais voir et entendre le professionnalisme du personnel. Autant commencer par la réceptionniste pourquoi pas. Si elle connaissait ses produits et ses services, cela voulait dire que je pouvais avoir confiance. C’était un bon endroit et non un faux semblant de spa bas de gamme.

Nikolaï était quelqu’un qui rougissait facilement. Il s’embarrassait d’un rien, timide et introverti même si parfois cela ne se voyait pas aux premiers abords. Certains sujets lui causaient plus de gêne que d’autres évidemment. Giratina en était un à n’en pas douter. Le rouge vif sur ses jours en témoignait. Je me souvenais bien de cette fois où je l’avais surpris à coudre cette peluche du pokémon légendaire. 100% fait main en plus. Il serait certainement mort de gêne si je ne lui avais pas dis que cela ne me dérangeait pas. Il faisait ce qu’il voulait après tout. S’il aimait ce pokémon divin, qu’est-ce que cela pouvait bien me faire en vrai? Rien du tout. Moi, j’avais un faible pour les pokémons de type spectre, de type vol ou encore ceux qui pouvaient flotter dans les airs. C’était tout aussi excentrique. Enfin, de mon point de vue.

- Mais bien sûr, Niko. Ce n’est qu’un simple intérêt.

Sarcastique? Un peu. Je connaissais son engouement pour le pokémon alors de le voir tenter de tourner cela en quelque chose de moindre me faisait rire intérieurement. Il aurait pu être mignon dans son embarras si le Tokanais avait eu une apparence décente sur le coup. Au moins, nous allions arranger cela très rapidement. Il serait de nouveau frais, propre et plein d’énergie. Je l’espérais tout du moins. Il pouvait aussi être relaxé, ce ne serait pas mal non plus. Je changeais de sujet ensuite, devant les portes de l’établissement.

Lorsque je parlai du sauna, je vis le visage de Niko se décomposer. Je fronçai les sourcils en le regardant alors qu’il semblait avoir perdu le peu de pétillant qui lui restait. Je secouai la tête en soupirant. Avait-il cru que j’allais l’entraîner de force dans le sauna? JE voulais y aller, mais jamais mon intention n’avait été de l’y traîner s’il ne le voulait pas. J’aimais bien le sauna et comme je n’étais pas pudique, je me foutais pas mal qu’on me regarde. Ce n’était pas un lieu de rencontre, mais simplement un lieu pour faire respirer sa peau et suer un bon coup. Il n’y avait rien d’intime dans ce genre d’endroit quant à moi. C’était certainement différent pour le champion de Tôkan.

- Je n’ai pas l’intention de t’y traîner de force. Je ne suis pas comme cela, tu le sais. Si tu ne veux pas y aller, c’est ton droit et c’est tout à fait louable. Je comprends que ta pudeur. Tu es prude et c’est bien aussi.

J’haussai les épaules et nous fînimes à entrer à l’intérieur où je fis mon client difficile. Cela sembla embarrasser encore plus l’homme à la chevelure rose bonbon puisqu’il demanda à ce que j’arrête tout de suite mon cinéma. Je crois que Nikolaï n’appréciait pas vraiment ce côté de ma personnalité. Pourtant, il venait avec tout le reste de ma personne. Je ne voyais pas le problème à exiger des réponses prompts et directes de la part du personnel de l’établissement spa. Enfin, je crois que mon collègue exagérait un peu trop.

- En quoi est-ce mal de demander des preuves? Je ne vois pas le problème.

Je ne pus pas en placer plus alors que Nikolaï prit les devants et annonça à la réceptionniste ce que nous allions prendre comme soins. Je grognai et croisai les bras sur mon torse en tirant un peu la gueule. No fun. Je jetai un œil à la demoiselle qui prenait les informations que le champion de Tôkan lui donnait. Elle semblait légèrement nerveuse quand même. Ma faute? Meh. Si un peu d’autorité pouvait ébranler les gens aussi facilement, ce n’était pas mon problème. Je n’étais pas en tort non plus.

Elle finit par nous dire le montant pour tout ce que nous voulions, nous informant d’un forfait journalier qui permettait d’avoir accès à tout dans l’établissement pour un 10% de plus que si nous ne le prenions pas. J’hochai de la tête et acceptai le deal. C’était quand même intéressant. Avoir accès à tout et pour la journée. Parfait pour moi.

- C’est une bonne offre. On accepte. Voici ma carte.

Je sortis mon portefeuille et lui tendis ma carte pour payer pour nous deux. Oui bon, j’avais une carte de crédit quand même. Un autre des trucs plus ou moins technologique que je possédais et qui m’étais utile. Il fallait bien que je puisse manger et vêtir non? En plus, mon loyer passait dessus aussi.

Je n’allais pas alimenter cette conversation. Nikolaï trouvait que mes agissements et mes paroles pouvaient être provocateurs pour la réceptionniste et les employés de l’établissement. Il fallait croire que malgré mes nombreuses années ici, à Bedwyr, exiger n’était toujours pas bien perçu. On avait le droit d’être un peu frais chier, mais pas de démontrer la moindre autorité. En tant que client bien sûre. J’étais très autoritaire en tant que professeur, dans ma classe et en dehors. Je ne voulais pas que les étudiants fassent n’importe quoi et qu’il déroge au règlement de l’académie. Surtout pas en son sein. Bref. Si je rendais mon collègue anxieux et inquiet vis-à-vis de mes agissements, l’ambiance allait être lourde pour le reste de la journée.

Assez rapidement, nous nous retrouvâmes à choisir par quoi est-ce que nous allions commencer. Niveau soin, je savais déjà ce que je voulais, mais Niko semblait hésiter. Il y avait beaucoup de possibilités aussi. Je le regardais alors qu’il se mit un peu à se plaindre sur la qualité actuelle de sa chevelure. Son cheveu était abîmé. Normal avec ce qu’il consommait et à quoi il carburait depuis quelques temps déjà. J’avais une forte envie de le lui dire, mais je me doutais qu’il risquait de mal  le prendre. Déjà que le champion d’arène avait dû gérer mon comportement face à la réceptionniste. Je pouvais essayer de doser, néanmoins.

- Hm…Il est vrai que tes cheveux son sec et terne. Tu dois manquer de nutriments et d’eau. Le sommeil aussi pourrait aider. Enfin, tu sais où je veux en venir, n’est-ce pas?

Le faire réfléchir par lui-même était une bonne façon de lui ouvrir les yeux sur ses mauvaises conduites vis-à-vis de sa propre personne. C’était parfait. Pas besoin de lui dire trop directement qu’il n’avait qu’à arrêter de fumer et de boire des boissons énergisantes merdiques. Je me demandais si Nikolaï prenait la peine de se faire à manger chez lui. Question un peu futile sachant qu’il ne devait pas manger beaucoup. Le boulot lui prenait tout son temps. C’était assez scandaleux. Je n’étais pas l’un de ses parents alors, je me devais de le laisser aller même si je n’aimais pas cela.

- Allons-y pour les cheveux alors. Cela ne fera pas de mal aux miens, un petit rafraichissement.

Je laissai le professeur de biologie passer devant moi. Je restais derrière et j’observais les lieux. C’était impeccable niveau salubrité. Du moins pour le moment. L’établissement était récent et bien entretenu. Bon point pour lui. Il ne restait qu’à expérimenter la qualité du service et des professionnels de l’endroit. Après, j’aurais ma petite idée de ce que valait réellement Spadodo. Pas que cela soit un besoin existentiel, mais j’aimais savoir à quoi j’avais affaire. Simple caprice de client.

- Après cela, j’irai dans le sauna. Je ne sais pas ce que tu compte faire ensuite, mais expérimente. Cela ne peut pas te faire de mal, au contraire.

Manière plus ou moins subtile pour lui dire qu’il avait grand besoin de soins corporels et esthétiques? Tout à fait. Je n’allais pas m’en cacher et Nikolaï savait exactement comment je le voyais à l’instant. Mes mots avaient été crus et directs sur ce banc et là, quoiqu’ils soient plus légers, il n’en restait pas moins qu’ils reflétaient ma pensée. PREND SOIN DE TOI, IDIOT.

- Je ne veux que ton bien, Niko.

Oui. Je voulais qu’il aille mieux. Pourtant outre lui offrir ce petit moment détente et spa, je ne pouvais rien pour lui. Sa thèse, c’était cela qui le rendait aussi peu attentionné de sa propre personne. Qu’elle se termine et vite! Voir un ami dans un état aussi lamentable ce n’était pas plaisant du tout. Enfin, c’était à lui la tête. Je ne pouvais pas le dissuader d’arrêter ses études de doctorant pour sa propre santé. J’allais passer pour qui, hum?

Nikolaï changea assez vite de sujet cela dit. Nous avions chacun besoin de soins pour nos cheveux alors lorqu’il me demanda comment est-ce que j’entretenais ma chevelure d’un blanc immaculé, je ne pus m’empêcher de sourire légèrement. Fastoche! Enfin, pour quelqu’un comme moi qui avait toujours eu la tignasse aussi blanche que la neige. C’était de famille. Pas un poil de couleur, que du blanc. Partout. Littéralement partout.

- Pour commencer, j’hydrate énormément mes cheveux. Ils ont besoin de beaucoup d’hydratation comme ils sont plus fins et fragiles que des cheveux normaux. Ensuite, je fais attention à espacer les shampoings. C’est important le sébum pour l’hydratation. Je n’utilise jamais d’appareils chauffants. Je laisse sécher naturellement et aussi, j’utilise des produits de qualité comme des shampoings violets. J’ai aussi tendance à alterner avec des shampoings clarifiants et j’utilise des compléments pour m’assurer de la santé de mes cheveux. Je veux qu’ils soient bien brillants, tu vois.

Je ne m’arrêtais plus de parler. Un vrai moulin à paroles! J’espérais avoir répondu au questionnement de mon collègue de travail. J’étais un expert du cheveu blanc alors, autant tout déballer d’un coup. J’étais fier de mes cheveux, moins de leur habitude à ne pas se laisser coiffer. Bref, on ne pouvait pas tout avoir. L’élégance avait un prix et c’était bien souvent un quota sur mon sommeil.

Je m’installai au côté du champion d’arène et de Tôkan et je laissai l’une des employés présente s’occuper de ma tignasse de neige. Elle retira le ruban et laissai cascader mes cheveux sur mon dos. Je lui demandai un rafraîchissement et une coupe des pointes uniquement. Le reste, je m’en chargerais chez moi.

- Tu as déjà beaucoup de soins en tête, je vois. C’est une bonne chose. Je t’avoue qu’après le sauna, je ne sais pas trop si je vais faire un massage ou ma manucure. Je crois que le mieux serait le massage pour bien délier les muscles. J’hésite encore. Tu en pense quoi? Enfin, je ferai en sorte de passer avant toi pour que tu puisses être seul dans la pièce si tu es trop gêné. Je respecte cela.

La demoiselle qui s’occupait de mes cheveux se mit à les brosser doucement avant de me poser quelques questions sur ce que je voulais réellement. Je soupirai, mais répondit brièvement à ses demandes. Elle me demanda ensuite de ne plus bouger la tête et de regarder devant moi, droit. Oui, très bien. Je pouvais faire cela. Je n’étais pas un gamin.

Cependant, lorsque Niko me parla de moi et d’enfants, je ne pus m’empêcher de tourner la tête vers lui, intrigué.

- Quoi? Tu crois que je serais un mauvais père? Je n’ai jamais songé à la parentalité. Toi…si tu l’étais, tes enfants t’adoreraient. C’est certain.

L’employée me fit signe de remettre ma tête bien droite et de regarder devant moi si je ne voulais pas qu’un accident capillaire arrive. Je m’exécutai non sans un coup d’œil à Nikolaï. Moi, père? Pfff…il faudrait déjà quelqu’un d’autre dans ma vie pour cela! La plupart des gens n’arrivaient pas à me supporter alors…Meh.

Nikolaï rougissait. Je le voyais du coin de l’œil. C’était très louable de sa part d’accepter ma présence lors de la séance de massage. Je le savais pudique et timide, mais aussi assez facile à rendre mal à l’aise qui plus est. Enfin, si cela ne lui dérangeait pas que je sois dans la même pièce que lui pour mon propre massage, c’était tout bon pour moi. Seul ou avec lui, je m’en moquais un peu. Tant que le massage faisait son effet et que le ou la massothérapeute savait y faire. Aucun problème. Nous étions là pour relaxer après tout. Pourquoi se prendre la tête? Non, pas aujourd’hui.

Puis vint sa réponse concernant les enfants. J’hochai mentalement de la tête. Pas envie de me retrouver avec une coupe hideuse si je bougeais réellement la tête. Je devais mettre ma chevelure de neige entre les mains d’une parfaite inconnue en espérant qu’elle savait ce qu’elle faisait. Très difficile. Vraiment, très difficile pour moi. J’étais assez bien dans mes routines même si essayer de nouvelles choses pouvaient apporter son lot d’excitation. Si l’expérience était nulle, au moins je saurais à quoi m’en tenir la prochaine fois. Ne pas y retourner.

- Tu sais quoi? Tu as raison. Je vais profiter du moment que j’ai ici avec toi et penser à l’avenir une autre fois. Impossible que je tombe sur la bonne personne pour moi juste en n’en parlant. J’ai déjà Pinku et il me prend pas mal de temps déjà. Un vrai dépendant affectif.

En plus, je ne l’avais même pas gâté. Il était juste comme ça. Pot de colle et hyper affectueux. C’était le syndrome pokémon élevé à la sortie de l’œuf. Ma propre définition en tout cas. Puis, dès que la coiffeuse eut terminé mes cheveux, je me regardai dans le miroir, m’assurant que tout était parfait. Verdict? Passable. Ce n’était pas laid et la longueur était similaire à ce que j’avais désiré.

- Je vais donc aller au sauna. On se revoit dans une trentaine de minutes pour le massage. Je risque de passer faire ma manucure avant, par contre. Profite-bien, Niko.

Je le quittai ensuite pour aller me relaxer dans la chaleur étouffante du sauna de l’établissement. J’en ressortis une quinzaine de minutes plus tard, en sueur et les pores de ma peau bien ouverts. J’en profitai pour prendre une douche rapide en évitant de mouiller mes cheveux fraîchement nettoyés et coupés. Une serviette les protégea, puis je me décidai à me balader en peignoir dans la bâtisse. Comme j’étais déjà dans l’enceinte des soins offerts, je ne dérangeais personne. De toute façon, je n’étais pas le seul à être en peignoir. Deux ou trois autres personnes aussi. Pas que je me serais senti seul, mais bon. Je n’avais pas l’air trop bizarre.

J’allai dans une pièce me faire faire une jolie manucure rapide, me disant que si je prenais un petit peu plus que trente minutes pour rejoindre Nikolaï, cela ne devrait pas trop gêner. D’ailleurs, je jetai un coup d’œil pour voir s’il était encore là, à la manucure. Je cherchai une tête rose bonbon alors que les employés s’affairaient comme des Fermites.

Si le champion d’arène me voyait ainsi vêtu, j’étais 100% certain qu’il en rougirait jusqu’aux oreilles. Sa pudeur, évidemment. Je n’étais pas assez charismatique ou beau pour lui faire de l’effet. Ce serait ridicule et certainement déplacé aussi. Hm, non.

- Niko, tu es encore là?

Pas le temps d’avoir de réponse qu’un homme me demanda de m’installer et me posa plein de questions sur ce que je désirai. Je grognai en étirant le cou. Si je l’avais loupé au moins je savais où le rejoindre. La salle de massage était à côté. Je soupirai avant de répondre rapidement à l’employé, lui demandant simplement un entretien et un nettoyage. Je n’allais pas mettre de vernis à ongles ou de faux ongles. Pas trop mon genre.

Je me disais que je l’avais complètement loupé quand j’entendis sa voix un peu plus loin. Je relevai la tête alors que Nikolaï s’approchait de moi. Je posai mon regard cuivré sur lui, notant mentalement qu’il avait une jolie teinte rosée sur les joues. Si timide ce professeur de biologie. Je lui fis un signe de tête lorsqu’il me demanda comment avait été ma session au sauna. Acceptable. Je m’étais bien détendu et j’avais bien sué.

Je dégageai la serviette qui retenait ma chevelure de neige, la laissant tomber au sol à côté de moi. Je la ramasserais après ma manucure. Mes cheveux cascadèrent sur ma nuque et mes épaules comme une avalanche. Je devrais peut-être aller faire un tour à Tôkan, un jour. Peut-être, oui.

- C’était bien. Je vois que tu retrouve des couleurs. Je suis rassuré.

Je l’étais réellement. Niko méritait mieux que de se pourrir la vie avec des cigarettes et des boissons énergisantes pour tenter de masquer sa fatigue. Là, il prenait soin de lui par l’entremise des autres. C’était un bon début. Vivement l’été pour qu’il puisse complètement se rétablir et redevenir l’homme que je connaissais.

- Tu as profiter de soins de peau? Elle m’a l’air beaucoup plus éclatante que tout à l’heure.

Petite analyse rapide de sa personne. Le champion d’arène me semblait aller mieux, en apparence. Il avait un bon smoothie dans le ventre, une peau fraîchement entretenue, des ongles joliment colorés. J’étais satisfait. Il ne restait plus que le massage.

Dès que l’employé eut terminé mes ongles, je me relevai et ramassai ma serviette pour la déposer dans un panier à cet effet. Je fis signe à mon collègue de me suivre dans la salle de massage où deux tables de massage nous attendaient. Les massothérapeutes n’étaient pas encore arrivés. J’allais m’installer à celle du fond.

- Fais à tes aises.

Moi, je ne me privai pas de le faire. Doucement, je détachai mon peignoir, dos à Nikolaï et je fis glisser le tissu épais et molletonné le long de mon corps. Mes épaules se découvrirent, puis mon dos nu, jusqu’à ce que le vêtement ne tombe au sol. Je frissonnai en sentant l’air frais de la pièce sur mon fessier nu.

Sans un regard pour l’homme à la chevelure rose bonbon, je pris une serviette sur la table, l’entourai autour de mes hanches nues et couvrit ce qui devait être couvert, du moins, le strict minimum. Je grimpai ensuite sur la table de massage et m’installai comme j’avais l’habitude de le faire dans les autres centres de relaxation et spas que je fréquentais.

- J’y pense, Tôkan c’est bien en été ou c’est mieux en hiver? J’aimerais peut-être aller y faire un tour, mais je ne sais pas quelle période de l’année est la meilleure pour du tourisme. Tu es originaire de là-bas, non? Donc, qu’est-ce que tu me conseillerais?

Nikolaï était la personne idéale pour demander ce genre de conseils. Puisqu’il venait de ce district, il pourrait me dire quoi apporter, quelles attractions y faire ou quels lieux visiter. J’avais envie d’en apprendre un peu plus sur lui en même temps. Cela faisait longtemps que nous ne nous étions pas croisés, même à l’académie. Cela faisait du bien de se retrouver un peu.

- Tu crois que je pourrais y faire de l’alpinisme? Ce serait trop bien.

Les massothérapeutes entrèrent à ce moment-là dans la pièce et chacun d'eux se dirigea vers l'un de nous deux. Le mien était roux, grand et assez costaud. Celui de Nikolaï avait des traits anguleux, une chevelure noire et rose et une série de piercings à l'arcane sourcilière gauche. Sympa.

J’écoute attentivement les conseils de Nikolaï. Je me doutais bien qu’il pouvait me renseigner sur Tôkan et ses contrées froides et glaciales. En même temps, j’en apprenais davantage sur lui et cela m’enchantais beaucoup. Nous avions grandi et nous étions maintenant des adultes. Rien à voir avec nos nous adolescents. Nos goûts avaient certainement changé, nos ambitions aussi. Les miens n’étais plus totalement ceux de mes années d’étudiants. Je m’étais mis au sport plus sérieusement, je m’entraînais régulièrement et je pratiquais plusieurs activités plus ou moins dangereuses.

Avant, je n’avais été qu’un rattata de bibliothèque qui fouinait dans les livres en quête de réponses et de savoir historique. J’étais le même sans toutefois être exactement le même qu’avant. Un Hermes toujours à la recherche de progression.

Je fermai les yeux en imaginant mon collègue patiner sur un lac gelé. Je ne savais pas s’il était de nature maladroite sur des patins ou non, mais c’était mignon à imaginer. Tout sourire et rigolant alors qu’il neigeait des flocons et lui tournoyant sur lui-même. Je me doutais qu’il devait avoir plus d’expérience que moi dans le domaine. Je n’avais jamais patiné de ma vie.

Cette image disparut bien vite lorsque mon massothérapeute se mit à me masser avec force. Mon corps était assez tendu et je grognai fortement lorsqu’il toucha une zone particulièrement difficile à délier. Des nœuds qui me pesaient grandement. Je fus somme toute pris d’un grand soulagement quand ils furent déliés.

- Je vois alors, j’irai peut-être cet été. Si l’escalade est moins dangereuse à ce temps-ci de l’année, ce sera parfait pour moi. Je ne me mettrai pas dans une situation périlleuse juste pour le plaisir.

Le massage faisant beaucoup de bien. Je me sentais me détendre peu à peu, presque somnolent sur la table de massage. Le rouquin s’affairait à me masser le dos et les épaules, les jambes, le cou…bref tout ce qui pouvait être masser.

- Je fais de l’escalade depuis un bon moment déjà. Du deltaplane aussi. Hm…Si j’ai réellement besoin d’un guide, tu as des noms à me conseiller?

J’aurai bien proposé au champion d’arène de venir avec moi, mais il était déjà débordé et je n’étais certainement pas une priorité. Nous venions à peine de nous retrouver. Pas besoin de lui mettre mon envie d’une visite à Tôkan sur le dos. J’allais gérer seul.

J’ouvris un œil tout en tournant la tête vers l’homme à la chevelure rose bonbon. Il s’inquiétait pour moi alors que je ne faisais qu’état d’une ambition de ma part. Niko devait tenir à moi quand même. C’était sympa de le savoir et de l’entendre en quelque sorte. Nous étions amis et malgré les absences sans ne serait-ce que se voir au détour d’un couloir, nous avions toujours un lien fort. Moi, l’homme rude et sans gêne et lui, timide et passionné. Surtout vis-à-vis de Giratina.

- Je suis heureux que tu sois vivant, Niko.

Oui, j’étais heureux qu’il ne soit pas mort lors qu’une excursion avec ses parents pas si sages que cela. Si cela avait été le cas, je ne l’aurais pas connu. Je n’aurais eu aucun ami sur qui compter durant toutes ses années à Bedwyr. J’étais choyé de l’avoir dans ma vie, même si ce n’était qu’un bref instant ici et là.

- Je te ferai savoir, lorsque j’irai. Juste pour que tu le sache.


Et pour que tu ne t'inquiètes pas. Cela, je le gardai que pour moi, cependant. Le temps passait assez vite et bientôt, le massage fut terminé. Je me sentais lourd et léger à la fois. C’était pareil à chaque fois que je me faisais masser. Je me redressai en grognant et m’asseyais sur la table de massage, face à Nikolaï. La serviette blanche tenait toujours en place et ne révélait rien d’alarmant.

- Alors, tu veux faire autre chose ou tu en as assez eu pour aujourd’hui?