Je me posais encore la question. Cette question qui me taraudait l’esprit depuis que j’étais arrivé sur les lieux. Cette même question que je trouvais au combien ridicule, mais qui me paraissait évidente quand même. Pourquoi un parc d’amusement avait un nom qui se rapprochait de la mort. Tueur…comme assassin…ou était-ce pour ce pokémon eau aux allures reptiliennes qui semblait bien dangereux avec cette gueule pleine de crocs aiguisés? J’étais dubitatif quant à la stabilité des installations et à la sécurité des consommateurs. Enfin…j’étais là alors…je n’allais pas rebrousser chemin. Malgré tout, j’avais entendu de bonnes critiques sur l’endroit. Meh. J’allais me faire ma propre idée et pour le moment, cela ne volait pas bien haut.

C’était samedi et il était tôt. Je ne pouvais pas rêver mieux comme journée pour venir dans un par d’attraction. Il faisait beau, pas un nuage dans le ciel. En même temps, qui disait beau temps, disait foule à profusion. Effectivement, même si c’était le début de la matinée, je voyais déjà une file se former à la billetterie et de l’animation à l’intérieur même de l’enceinte du lieu de plaisance. Je me pose dans la file derrière une femme et son fils, attendant patiemment mon tour. Après cela, j’allais décider de ce que j’allais faire. Pinku erre ici et là en volant d’un endroit à un autre, finissant cependant toujours par revenir vers moi. Pas besoin de le surveiller. Je le connais. Il revient toujours. L’intimité avec ce pokémon, inexistante.

Je me racle la gorge et tombe doucement dans mes pensées. Je me revois, jeune enfant, alors que mes grands parents me racontent des histoires sur la région d'Alola, la région de mes ancêtres. Ils ne l’avaient pas connu, mais leurs parents, oui. Cette région semblait avoir été jadis bien festive. Un peu comme un parc d’amusement de plusieurs îles. Des mœurs différentes, des coutumes différentes et beaucoup de joie et de fêtes. Uchinâ en était une pâle copie.

Je sors de mes souvenirs lorsque mon Tylton se pose dans mes cheveux. Je sens ses petites serres s’enfoncer dans les mèches de ma chevelure de neige et je sais que ce sera galère de l’en décrocher ensuite. Ce piaf. Je soupire et j’avance alors que lui piaille de joie et de confort. La chance qu’il a. Je le laisse faire et après une dizaine de minutes, je paie mon ticket d’entrée pour Walygatueur et j’entre enfin sur place. C’est vraiment grand à vu de nez…mais difficile de me faire une bonne idée de l’ensemble de l’endroit sans un point de vue aérien. Je cherche alors le manège le plus haut et je vois la grande roue. Elle dépasse carrément tout. Okay. J’y vais alors.

Je me dirige donc vers la grande roue, prêt à aller toucher le ciel, métaphoriquement parlant. Puis, juste quand j’arrive pour me mettre dans la file d’embarquement, une mascotte vient m’accoster en se plantant directement devant moi. Je lève un sourcil en observant son costume assez pittoresque et ludique. Ne serait-ce pas un Aligatueur avec un chapeau melon? Hehh…sans commentaire.

Cette mascotte m’ennuie, sincèrement. Elle gesticule et sautille devant moi pour attirer mon attention ou simplement tenter de me tirer un sourire, mais cela m’irrite plus qu’autre chose. La paix. Je voulais la paix et la tranquillité. Même si je me trouvais actuellement dans un parc d’amusement, il y avait tout de même possibilité que je puisse être tranquille avec moi-même. Je claquai ma langue contre mon palais en regardant avec dédain l’Aligatueur avec ce stupide chapeau melon sur la tête. J’avais envie de l’incendier de mots durs, mais une voix familière éteignit tout cela.

Je tournai la tête pour voir une chevelure couleur bubblegum et des couleurs pastelles que je connaissais bien. Niko était là. Je répondis à son signe de main par une gestuelle identique et le laissai approcher de moi. J’étais soulager de le voir. Au moins, grâce à lui, je n’allais plus malmener une pauvre mascotte et l’individu à l’intérieur.

- Malgré les apparences, j’aime me divertir un minimum. Je suis heureux de te voir, Niko. Tu as effectivement meilleure mine.

Je levai mes orbes de cuivre vers le Cornèbre sur le chapeau melon de la mascotte d’Aligatueur et je secouai la tête pour signifier que ce n’était pas le mien. Je n’avais que mon Tylton comme seul et unique compagnon pour le moment. Celui-ci était d’ailleurs bien agrippé à ma chevelure de neige, ses serres bien emmêlés dans mes mèches rebelles et ce fouillis qu’était mes cheveux au naturel. Je levai une main pour aller lui gratouiller le menton, le faisant piailler de bonheur.

- Je ne sais pas à qui il appartient, mais ce n’est pas le mien. Pinku est mon seul pokémon.

Il y avait une grande différence vestimentaire entre Niko et moi. Lui, pastel et couleurs légères tandis que moi, je ressemblais à un punk rebelle avec mes vêtements sombres, mes chaînes, mes jeans déchirés et mon crayon noir sous les yeux. J’avais l’air d’un homme pas très fréquentable. Mais, les gens se fiaient souvent à l’apparence au lieu de connaître avant la personne en question. Stupides jugements.

Je reportai mon attention sur le champion d’arène et ses pokémons.

- J’allais faire un tour de grande roue pour pouvoir admirer le panoramique et me faire une idée de la grandeur du parc. Serais-tu intéressé à m’y accompagner?

J’étais soulagé. Niko se portait mieux, il avait réellement recommencé à prendre soin de lui et cela avait un impact positif sur sa personne. J’avais été cruel et dur avec lui lors de notre dernière rencontre, mais je ne le regrettais pas. Je ne mâchais pas mes mots pour personne. Être franc et direct c’était ma manière d’être et la délicatesse dans mon cas n’était pas coutume. Enfin…sauf véritable exception. Très rare, cela dit.

Je pus observer la jolie teinte rosée sur ses joues, mais je ne m’en formalisai pas. J’avais l’habitude de voir Niko rougir pour tout et pour rien. Cependant, je ne pouvais pas nier que je trouvais que cela lui allait bien. Et puis, lorsque le rose questionna la mascotte d’Aligatueur concernant le pokémon de type vol sur son chapeau melon et que Walygatueur lui fit signe que ce n’était pas à lui, je me mis à réfléchir sur la raison de sa présence près de nous. Un pokémon sauvage restait un pokémon sauvage, une créature parmi tant d’autres. Quoique…si elle vivait dans ce parc d’attraction, elle devait être un peu domestiquée et accepter la présence humaine. Hm…

- Je n’ai pas de nourriture à te donner, jolie Cornèbre, tu devrais aller voir d’autres humains qui t’en offriront avec plaisir.

Après mes paroles, je me tournai vers mon ami et l’écoutai parler, faisant référence au fait que je ne ressemblais pas à un professeur d’histoire. À quoi ressemblait un prof d’histoire de toute façon? Il n’y avait pas de modèle type à suivre ou quoi que ce soit du genre. J’aimais être sobre et professionnel à l’académie, mais en dehors, je retrouvais mes vrais goûts vestimentaires.

- En dehors de l’académie, je ne suis plus un professeur d’histoire, mais simplement moi, Hermes Umalei. Si la société n’aime pas comment je m’habille alors, je m’en fous. Je m’aime comme je suis et personne ne peut me retirer cela.

Mes mots étaient aussi pour Niko que je savais assez sensible. Il avait besoin de s’affirmer un peu plus dans la vie et de ne pas laisser le jugement des autres l’atteindre aussi facilement. Tous pouvaient avoir une opinion, mais celle de soi-même était la plus importante. Point final.

Je laissai Niko me guider dans le parc après qu’il ait récupéré son Klefki. Ce pokémon…je l’avais vu disparaitre plusieurs fois au cours de mes rencontres avec le rose. Soit il manquait de discipline, soit il était beaucoup trop curieux. Dans tous les cas, le professeur de biologie devait resserrer les vis et essayer de faire comprendre à son compagnon de rester auprès de lui. Je savais que mon ami serait dévasté s’il le perdait pour toujours. Je ne voulais pas cela pour lui.

Bien vite, nous nous retrouvâmes tous les deux dans une cabine de la grande roue, l’un en face de l’autre. Nos pokémons étaient avec nous bien évidemment, mon Tylton sur ma tête à gazouiller de bonheur. J’espérais qu’en évoluant, il perdrait cette mauvaise habitude. Je n’allais pas supporter un Altaria sur ma tête…direction l’hosto…

Mon regard cuivré se posa sur Nikolaï et je le vis un peu nerveux. Je le dévisageai quelques instants avant de porter mes yeux vers l’horizon que je voyais s’étendre au loin. Vraiment, on voyait beaucoup mieux le parc d’amusement d’ici. C’était grand, beaucoup plus que je l’avais imaginé.

- Niko, quelque chose te tracasse?

Je ne le regardais pas, mais laissai simplement la question flotter dans l’air, m’interrogeant sur mon compagnon. Isolés comme nous l’étions, il allait peut-être s’ouvrir sur quelque chose que je ne savais pas encore de lui. Qui sait?

- Nous ne nous sommes pas vus si souvent que cela non plus. Nos activités professionnelles remplissent déjà bien une partie de notre quotidien.

Évidemment, nous avions un lieu commun où nous croiser de temps en temps, l’académie Uxie, mais même avec cela, c’était plutôt rare. Niko était aussi champion, il bossait dur sur sa thèse et sûrement qu’une partie de son temps libre servait à angoisser et réfuter toutes ses théories. Je le plaignais un peu en vrai. Le rose devait s’enfermer dans son monde pour oublier le reste et cela, juste pour ne pas défaillir complètement. Enfin, c’était mon hypothèse. J’avais peut-être tort.

Je ne fis pas trop attention aux propos concernant les rumeurs qu’on disait sur moi. J’en avais déjà une qui circulait dans le quartier où je vivais et qui disait que j’étais un soi-disant nudiste. Foutaises. Je n’étais jamais nu outre dans ma salle de bain et dans ma chambre, des lieux privés en somme. Les gens me regardaient bizarrement, mais je les ignorais. Si je devais prendre en considération les jugements et les points de vue de tout le monde, je serais certainement devenu schizophrène ou une loque quelque part dans le fond d’une ruelle à me morfondre sur mes défauts. Pas du tout mon genre. Je savais me tenir loin des messes basses et des non-sens de ce monde.

Or, je savais que certaines personnes comme Nikolaï pouvaient être sensibles à ce que l’on disait sur elles. Un manque de confiance en soi et c’était l’hécatombe dès que l’on entendait un commentaire négatif sur soi. Il fallait savoir se créer une carapace ou sinon, on y passait et c’était dur de se reconstruire après cela. Voir des gens être l’ombre d’eux-mêmes, je n’aimais pas trop cela. Je préférais donc éviter de me retrouver dans ce genre de situations. Je n’étais pas la personne la plus empathique au monde et il n’y avait rien de plus embarrassant et ennuyeux pour moi que de devoir gérer des états d’âme.

Comme je le pensais tout au fond de moi, mon collègue évita soigneusement ma question en me délivrant des propos sans grand intérêts. Il ne voulait pas répondre? Soit. Je n’allais pas insister. Nous étions tout en haut de la grande roue et mon regard ne se détachait pas de l’immensité du par d’attraction. C’était assez intriguant de voir qu’un endroit comme cela existait vraiment. Des manèges en tout genres, des kiosques attrape-nigauds, des haltes de restauration, etc. Il y avait de tout pour tous et chacun. Pour ma part, le simple fait de pouvoir observer tout cela me satisfaisait. Je pouvais étudier des yeux la distribution des zones ici et là et me questionner sur l’optimisation de l’endroit. Ma conclusion après quelques minutes à visualiser tout cela? Il y avait place à amélioration. J’étais peut-être un peu trop critique, mais j’étais comme cela.

Je finis par tourner mes orbes de cuivre vers l’homme à la chevelure rose alors qu’il me faisait remarquer que nous ne bougions plus depuis un moment et que la roue semblait complètement arrêtée. Ah bon. Meh. Je n’en avais rien à faire. La plupart de mes passe-temps se trouvant à me retrouver confronté au vide. J’avais l’habitude des hauteurs et n’en avais pas peur. Comme quoi l’improbable n’était jamais bien loin des mots.

- Je ne vois pas pourquoi tu te mets dans tous tes états. La roue ne risque pas de se décrocher de son socle et les cabines ne risquent pas de se détacher et de s’écraser au sol. Nous ne sommes pas dans un film catastrophe. Reprends-toi un peu, Niko.

Je grogne et fais claquer ma langue contre mon palais, agacé. L’autre se met à déblatérer des trucs comme quoi il porte la poisse, qu’il est le grand messie du malheur et j’en passe. Tout pour m’ennuyer en gros. Je finis par me lever de mon banc et je m’approche de lui. En tout bon ami que j’étais, je lui assénai une bonne gifle au visage pour tenter de le ressaisir, le regard sévère et le visage neutre. Habituellement, une stimulation physique vive aidait à recouvrer la raison…à savoir si cela fonctionnerait sur lui, aucune idée.

- Si tu es pour te comporter comme un bébé alors la prochaine fois traîne toi une couche et une tétine. T’es vraiment lourd quand tu t’y mets, Niko. La dernière fois tu ne ressemblais à rien et là, t’as l’air d’un taré en pleine psychose de fin du monde. Faut savoir à la fin…Il n’y a aucun risque que l’on meurt dans ce manège, ni toi, ni moi.

Les probabilités que le manège se crashe au sol et cause de nombreuses morts étaient quasi inexistantes. Un parc d’amusement de cette envergure devait avoir des tas de règlementations concernant la sécurité pour chacun des manèges qui se trouvaient ici. Enfin, encore là et car, je n’étais pas un expert en la matière, mais un simple humain doué de raison et de logique, ce n’était que mon propre point de vue.

- Prend une grande inspiration, retiens-la dix secondes et après, tu expires tout et tu recommences. Ferme les yeux si tu sens que cela va te calmer.